Mal ou pas Mal

[amelie]

Bonjour,

Je m'appelle Amélie. Je ne suis pas autiste. Mais je m'interesse à l'autisme. Je suis tombée sur votre site par hasard, en faisant des recherche sur le sujet. J'ai parcouru plusieurs de vos postes, et j'ai trouvé plein de choses intéressantes à votre égard, que je ne connaissais pas, ou que je ne comprenais pas bien. Mais, il y a une chose en particulier qui reste floue et que je peine à comprendre, c'est votre relation à la douleur ?

J'ai lu sur l'un de vos poste que l'un s'était cassé l'os du fémur et n'avait pas franchement ressenti de douleur atroce, un autre qui expliquait qu'il ne remarquait pas s'être écorché les genoux avant que ceux ci ne cicatrisent... C'est perturbant pour une personne qui n'est pas atteinte d'autisme de comprendre cette absence de sensation. En me renseignant j'ai lu deux recherches sur le sujet : une de Tordjman (1999) et une de Pernon (2003), celles ci concluent toutes deux que les personnes autistes ne sont pas insensible a la douleur ( bien au contraire) mais qu'elles l'exprimaient différemment ( Prédominance des réactions motrices et sonores.) Mais quand je lis ici que certains ne perçoivent pas la douleur, je ne sais plus quoi penser ?

Est ce que vous sauriez m'éclairer??

Un grand merci

[cend]

Bienvenue ici

[charles_x]

Personnellement, nettement hypersensible (notamment au niveau thermique). Mais quoi qu'il en soit, ne crie jamais à la douleur, je veux dire : expression minimale. Il fut une époque où des médecins disaient que j'encaissais trop les douleurs physiques sans rien signifier, ce qui était compliqué pour elleux.

Bon après, j'ai particulièrement une pathologie neuromusculaire, donc ça parasite fort probablement pas mal d'aspects.


z

[Luna]

Ca dépend, ça peut être les extrêmes. Hypersensible quand il s'agit des douleurs dites féminines qui m'angoissent et me terrassent complètement. Pour le reste, je n'ai même pas senti mes 2 prémolaires plombées par la carie jusqu'au nerf. J'aurai du me cogner la tête contre les murs, d'après ma dentiste.

[bernard]

A mon avis, je ne dirai pas qu'on ne ressent pas la douleur, je dirai plutôt qu'on la maitrise et qu'on finit par l'oublier.
Dans mon cas, j'ai du me faire enlever un kyste en bas du cou qui me gênait pour le passage de la ceinture de sécurité dans la voiture. Je suis allé voir un dermato et je pensais qu'il allait me l'enlever et puis c'est fini. C'était il y a une quinzaine d'année en arrière. Il a commencé à me dire qu'il allait faire une ponction puis que je reviendrai pour me le faire enlever sous anesthésie locale. Sur le coup j'ai été furieux d'apprendre que je devrai attendre encore des semaines. Je lui ai demandé s'il ne pouvait pas l'enlever là tout de suite avec un scalpel. Il a été surpris, m'a dit oui mais cela peut faire mal. Je lui ai dit d'y aller. J'ai bien senti le scalpel qui entaillait la chair, mais j'étais plus heureux de me débarrasser du kyste que de ressentir une hypothétique douleur. Est-ce que c'est le raisonnement logique qui l'emporte sur une appréhension de l'inconnu ? Je ne me souviens pas que cela ait fait mal. Je me souviens juste de la tête du dermato qui me regardait pour savoir si je n'allais pas tomber dans les pommes. On a juste parlé de la kératine qui est formé de soufre et qui expliquait la puanteur qui s'échappait du kyste une fois ouvert.
Et pourtant, je ne supporte pas une prise de sang. La dernière fois, je me suis retrouvé sur le carrelage. Là ce n'est pas la douleur mais une certaine appréhension je suppose.
Ma fille de 12 ans qui est aspie, s'est cassée un bras il y a quelques années. Elle courrait dans un gymnase avant un cours de judo et a heurté violemment un mur en s'arrêtant avec son bras. Le prof de judo a pensé qu'elle s'était fracturée un bras, mais elle a dit "même pas mal" et a fait son cours de judo. Mais le soir, alors qu'elle ne montrait aucune douleur, le prof nous a suggéré de passer une radio. J'étais persuadé qu'elle n'avait rien : résultat = radius et cubitus fracturés en motte de beurre (fracture puis enfoncement des morceaux). Elle a juste pleuré quand on lui a annoncé 2 mois sans équitation (sa passion).

[amelie]

Tout d'abord, merci pour vos réponses.

Donc vous percevez bien l'effet de la douleur. Mais ce n'est pas systématique. J'avais lu, dans ce forum il me semble, que cela pouvait s'expliquer (enter autre) par votre capacité à porter votre attention sur un détail particulier. Dans ton cas Bernard, est ce possible que ton désir d'éliminer ce Kyst est pris le pas sur la perception de la douleur ?

Que doit on comprendre dans le cas d'un enfant qui semble s'être fait rudement mal ( comme ta fille Bernard) mais qui dit n'avoir pas mal ?? Qu'elle n'a donc vraiment pas mal ?

et que donc, dès qu'un enfant crie pour une chose qui a priori ne provoque pas de douleur ( lui mettre un nouveau pantalon) doit D OFFice nous permettre d'interpréter que là il y a douleur ?

[Luna]

Pour le pantalon : rien que le frottement ou le type tissu peut être perçu comme "douloureux" pour un enfant autiste.
Perso, dans bien des cas, le contact physique, l'étreinte m'est souvent désagréable, à la limite de la douleur. Dans de rares cas, j'apprécie et je me laisse aller.

[bernard]

J'avais lu, dans ce forum il me semble, que cela pouvait s'expliquer (enter autre) par votre capacité à porter votre attention sur un détail particulier. Dans ton cas Bernard, est ce possible que ton désir d'éliminer ce Kyst est pris le pas sur la perception de la douleur ?

Dans mon cas, certainement.

Que doit on comprendre dans le cas d'un enfant qui semble s'être fait rudement mal ( comme ta fille Bernard) mais qui dit n'avoir pas mal ?? Qu'elle n'a donc vraiment pas mal ?

Quand je lui ai posé la question, elle disait qu'elle n'avait pas mal.
Mais comment savoir si elle avait mal ou pas, puisqu'elle ne montrait pas de signes de douleur.

et que donc, dès qu'un enfant crie pour une chose qui a priori ne provoque pas de douleur ( lui mettre un nouveau pantalon) doit D OFFice nous permettre d'interpréter que là il y a douleur ?

C'est compliqué à expliquer.
Mettre un pantalon fait d'un tissu insupportable pour la personne avec TED, va provoquer une hypersensibilisation et une réaction hors norme si on l'oblige à le mettre. C'est une douleur moitié psychique, moitié physique. Dans mon cas, plus jeune, je ne supportais pas les pantalons qui contenaient de la laine dans le tissu. J'en ai pleuré de nombreux essayages. Pour les T-shirts, c'était l'histoire des étiquettes qui grattaient. J'en serai venu à m'arracher la peau, à me faire saigner, si on me forçait à les enfiler. Je ressentais cela comme une vraie torture. Or, qui dit torture, dit douleur. Pour un NT, cela peut paraitre absurde, mais c'est ainsi.

[Ole Ferme l'oeil]

La première chose à savoir c'est que l'autisme est un spectre très large et que ce qui est valable pour une personne autiste ne l'est pas forcément pour l'autre, vous ne trouverez probablement jamais un aspect qui s'applique de la même façon à tous les autistes

[amelie]

Le toucher semble donc bien un sens bien particulier pour vous.

Temple grandin dit qu'elle rêvait de pouvoir être etreinte ( avant d'avoir créer sa machine) mais qu'elle en était incapable.

Mais qu'en est il de l'automutilation alors ? Quel sens doit on leur donner ? Les stopper ne fait il pas souffrir davantage la personne ?

[Luna]

Au juste : pourquoi ces questions ? Simple curiosité de badaud ou intérêt véritable ? Connais-tu une personne vivant avec autisme ?

[cend]

je dirai plutôt qu'on la maitrise et qu'on finit par l'oublier

Et pourtant, je ne supporte pas une prise de sang. La dernière fois, je me suis retrouvé sur le carrelage. Là ce n'est pas la douleur mais une certaine appréhension je suppose.

idem

Mais qu'en est il de l'automutilation alors ? Quel sens doit on leur donner ? Les stopper ne fait il pas souffrir davantage la personne ?

c'est complètement différent et c'est un autre sujet qui peut devenir personnel ( j'ai pas le bon mot, peut être intime ? ) et aussi quelque peu difficile d'en parler et que en face la personne le comprenne, enfin je pense.......

Au juste : pourquoi ces questions ? Simple curiosité de badaud ou intérêt véritable ? Connais-tu une personne vivant avec autisme ?

D'accord avec toi

[amelie]

Me revoici.

Tout d'abord, j'espère que mes questions n'étaient pas déplacées ou indiscrètes, si c'était le cas, je vous présente mes excuses.

Non je ne connais pas personnellement une personne autiste. Je ne pense pas n'en avori jamais rencontrée ( ou bien la personne ne me l'a pas fait savoir ) Je vous pose toutes ces questions parce que ça m'interpelle beaucoup. Pourquoi ? pour tout vous dire, j'ai fini mes étude de psychologie l'année dernière. Eh oui je suis "psy" mais je ne travaille pas encore ( je cherche...) j'ai une amie qui a travaillé dans un centre pour jeunes enfants autistes ( sévères). Elle m'a fait part de son expérience et uen chose en entrainant une autre, j'ai approfondi le sujet. Plus précisemment encore, cette amie a débuté un travail de recherche sur les méthode de soins pour les enfants autistes. Elle a examiné en particulier la méthode du packing. ( connaissez vous? )

enfin voila l'histoire, en abordant tout ca avec elle, j'ai lu un livre ( autisme et émotion ( vermeulen 2009) qui parle beaucoup des autistes de haut niveau.

Et puis j'ai continué à chercher des choses ... on dit tellement de chose sur vous.. et pour ma part, quand je vous lisais et que je lisais des trucs je sentais des incohérence. Alors je me suis dit qu'au lieu de fouiller des articles j'allais vous poser mes questions directement.

Je tenais à offenser personne.

[Mars]

Bonjour et bienvenue Amélie. Ce n'est pas plus mal de savoir pourquoi ces questions t'intéressent. Je pense que tu as choisi une voie intéressante, à savoir, poser tes questions aux personnes concernées.
Quant au packing, il n'a pas du tout bonne presse ici . Il y a déjà un topic là-dessus :
http://forum.asperansa.org/viewtopic.ph ... it=packing
Je ne crois pas que beaucoup de membres du forum aient eu l'occasion d'en "bénéficier" que ce soit pour eux ou pour leurs enfants mais le principe même du packing pose problème à la plupart d'entre nous.

[omega]

Bonjour,

Mais qu'en est il de l'automutilation alors ? Quel sens doit on leur donner ? Les stopper ne fait il pas souffrir davantage la personne ?

Pour moi, ça permet d'évacuer l'anxiété ou une autre douleur plus insupportable. Donc en effet, je n'apprécie pas trop qu'on m'y prenne et qu'on s'en mêle sans avoir rien compris au film.

Pour moi, la douleur dépend surtout de la notion d'agression.
Une piqûre ou une tape brusque sont des actes hautement agressifs donc hautement douloureux, tandis que "remboiter" une épaule ou enlever une dent cariée, si c'est nécessaire, c'est bien accepté, donc pas vraiment douloureux.
Enfin un peu quand même mais bien toléré et supportable, la douleur devient alors plutôt une information. (comme l'a bien décrit Bernard)
Je suis beauuucoup plus sensible à l'agression qu'à la douleur.

(d'ailleurs, dans l'automutilation, c'est pareil +++ )