L'Etat condamné à trouver un hébergement spécialisé

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Jean
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L'Etat condamné à trouver un hébergement spécialisé

#1 Message par Jean » lundi 7 octobre 2013 à 22:45

L'Etat condamné à trouver un hébergement spécialisé pour une jeune femme handicapée
Le Monde.fr avec AFP | 07.10.2013

Agée de 19 ans, Amélie n'avait plus de place en centre spécialisé depuis sa majorité.

Le tribunal administratif de Pontoise a ordonné lundi 7 octobre à l'Etat de "prendre toutes dispositions" pour qu'une place en hébergement spécialisé soit trouvée pour Amélie, une jeune femme de 19 ans lourdement handicapée qui avait attaqué l'administration. L'agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France doit "prendre toutes dispositions pour qu'une offre de soins permettant la prise en charge effective, dans un délai de quinze jours, de la jeune femme, par un établissement médico-social adapté à son état, soit présentée à ses parents", a jugé le tribunal, sous peine d'une astreinte de 200 euros par jour de retard.

"Eu égard à l'absence de prise en charge médico-sociale" de la jeune femme "et à l'épuisement psychique de la famille, il y a une atteinte au droit à la vie", a avancé son avocat, Me Karim Felissi. Dans la famille d'Amélie, la fin de la prise en charge par des établissements spécialisés, auxquels elle a eu accès jusqu'à sa majorité, a marqué un bouleversement. En octobre 2012, elle a dû quitter l'institut médico-éducatif qu'elle fréquentait et qui, selon sa mère, "n'était plus adapté".

"NOUS DEVONS TROUVER UNE SOLUTION TEMPORAIRE"

"Amélie est complètement isolée, elle n'a plus de relations sociales" depuis qu'elle reste à la maison, s'est désolée sa mère lors de ce procès. "Le fait qu'elle soit [à la maison] sans activité, ça développe tous ses troubles", a-t-elle expliqué. Le syndrome de Prader-Willi, une anomalie génétique rare dont elle est atteinte, a entraîné un retard mental et l'a rendue obèse. Elle souffre aussi de troubles autistiques et de troubles envahissants du développement, et doit être surveillée 24 heures sur 24, une tâche éprouvante et épuisante pour ses proches.

Le conseil général du Val-d'Oise et l'ARS d'Ile-de-France se sont défendus en affirmant qu'une solution d'hébergement a été trouvée, mais dans un établissement à Baumont-sur-Oise encore en travaux, qui ne peut l'accueillir dans l'immédiat. "Nous devons trouver une solution temporaire", a concédé Marion Leroux, directrice générale adjointe en charge de la solidarité au conseil général, ajoutant toutefois que le département avait déjà "fait énormément de recherches" pour la jeune femme. "Ses comportements assez destructeurs font qu'il est très difficile de trouver un établissement adapté", d'autant que "la famille refuse de s'en séparer totalement, refusant une place dans un établissement belge à cause de l'éloignement", a-t-elle souligné.

DES STRUCTURES SATURÉES

Au-delà de ce cas, une fédération d'associations spécialisées dans la défense des personnes handicapées mentales, l'Unapei, espère que ce précédent permettra aux handicapés d'obtenir non seulement des dommages et intérêts, comme c'est le cas actuellement, mais une obligation pour l'Etat, sous astreinte par exemple, de leur trouver une place. "Nous voulons montrer que c'est un déni de citoyenneté", a déclaré la présidente de l'Unapei, Christel Prado, regrettant que les lois prévoyant l'accueil des personnes handicapées "dans des établissements adaptés à leurs besoins ne soient pas appliquées". Plus d'une "dizaine de milliers" d'enfants et d'adultes handicapés cherchent en vain un hébergement spécialisé en France, selon cette fédération.

En région parisienne, les capacités d'accueil d'adultes et d'enfants handicapés dans des établissements spécialisés ont augmenté ces dernières années mais les institutions restent saturées. La région Ile-de-France dispose de 3 515 places pour adultes handicapés en maison d'accueil spécialisée, et 3 050 places en foyer d'accueil, pour des adultes plus légèrement handicapés, selon l'ARS.
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#2 Message par Nath62 » mardi 8 octobre 2013 à 0:34

Un peu de positif qui fait du bien mais choquée par ça "d'autant que "la famille refuse de s'en séparer totalement, refusant une place dans un établissement belge à cause de l'éloignement", a-t-elle souligné.
". On nous parle de mauvais traitements à enfants, d'abandon de famille et hop, parce que ça aurait arrangé tout le monde, on aurait bien voulu se décharger de ce poids difficile à gérer bien loin.... Comment oser penser que ça aurait pu être une solution.

J'admire ces parents qui n'ont pas voulu lâcher l'affaire et s'en sont tenu aux besoins de leur fille, pa sà leur confort personnel.
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#3 Message par Amarilli » mardi 8 octobre 2013 à 7:39

Pareil, je suis choquée par la même phrase... ça veut dire quoi, de couper une jeune fille, présentant tous les troubles décris, de sa famille ?
Elle va devoir s'adapter à une nouvelle structure, de nouvelles personnes, et tout ça, sans avoir ses parents à proximité pour l'aider dans cette transition difficile ? Elle est où l'humanité dans tout ça ?

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#4 Message par Benoit » mardi 8 octobre 2013 à 9:47

Ce n'est pas une question d'humanité c'est une question de moyen, enfin je suppose.

Il faut regrouper un certain nombre de personnes pour qu'un établissement ait la taille suffisante, on ne va pas construire un lieu par sous-préfecture, surtout en période de crise.
Ca n'empêche pas d'aider la famille à faire des déplacements réguliers (en prenant en charge frais de déplacement et de logement des proches en Belgique, si l'institution n'a pas déjà des places réservées aux proches visitant).

Décrite comme dans l'article, la solution que dit avoir trouvé l'ARS (proposer une solution transitoire à l'étranger le temps que se construise un lieu dans la région) me semblait raisonnable à moi.
Je suppose qu'il y avait des sous-entendus derrière (solution provisoire qui dure, etc...)

Pour information la page de l'Unapei fournit le texte de la décision du TA.
http://www.unapei.org/La-famille-d-Amel ... dulte.html
J'attire votre attention sur le bandeau à droite :
Faute de place en établissement médico-social malgré une orientation par la MDPH, elle a vécu chez ses parents pendant près d’un an.
Dorénavant, les MDPH vont être tentées (pour celles qui ne le font déjà) de prendre en compte les places disponibles pour les orientations. Bravo.
Identifié Aspie (広島, 08/10/31) Diagnostiqué (CRA MP 2009/12/18)

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Être Aspie, c'est soit une mauvaise herbe à éradiquer, soit une plante médicinale à qui il faut permettre de fleurir et essaimer.

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#5 Message par Nath62 » mardi 8 octobre 2013 à 17:53

Je n'ai vu nulle part, Benoit, la mention de cette aide aux parents pour aller rendre visite à leur fille et je sais à quel point, quand on se sait fragile, si nos proches nous font du bien, ça peut être dramatique. Et c'est pour ça que je pense que les parents ont bien fait de ne pas l'accepter.

Maintenant, je me trompe peut être et que tout avait été prévu.... Ce que ça nous changerait ;)

Et oui, il faut espérer que ça n'amènera pas une dérive dans une situation actuelle déjà très très difficile.
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Re: L'Etat condamné à trouver un hébergement spécialisé

#6 Message par Benoit » mardi 8 octobre 2013 à 18:19

Si on lit tous les articles, on apprend que l'ARS avait déjà trouvé une solution acceptable pour tout le monde mais que le courrier s'est peut être perdu en route.
Enfin si on veut bien les croire. :roll:

Par contre, croire que ce genre de décision va ouvrir une porte de façon définitive, il ne faut pas rêver. On est dans un système dont les moyens sont limités, il faut bien se mettre ça dans la tête.

Ce sont les MDPH qui vont faire fonction de filtre à la place, et du coup il va y avoir une "hiérarchisation" des besoins. (Et si j'était pessimiste, je dirais qu'on va aller vers un système ou les associations elles mêmes choisiront en pratique qui a droit et qui n'a pas droit en fonction de critères liés à la compétence sociale des gens qui demandent, autant dire que pour les adultes autistes ça va pas être la peine d'attendre quoi que ce soit).
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#7 Message par Jean » mercredi 9 octobre 2013 à 0:56

Je rappelle que si les MDPH font le travail de préparation, les décisions sont prises par les CDAPH, dans lesquelles les associations d'usagers représentent le tiers des sièges.

Lorsque ces associations sont bien organisées, elles pèsent beaucoup dans les décisions.

Dans un certain nombre de CDAPH, elles ont pu imposer la logique de la réponse en fonction des besoins des usagers - comme le prévoit la loi, et non en fonction de l'offre institutionnelle existante.

Dans ce contexte, cette décision du tribunal administratif (à rapprocher de la jurisprudence Beaufrère, mais qui se traduisait seulement par des dommages et intérêts a posteriori) va jouer un rôle contraignant sur les financeurs, qui auront un risque financier de non-réponse aux besoins.

Mais tu as raison, Benoît, de dire qu'il y a un risque.

Par ailleurs, il est normal que les usagers tiennent compte de l'existant pour déterminer ou modifier leur demande. Si l'usager sait qu'une structure plus ou moins adaptée va s'ouvrir près de chez lui, il sera tenté de demander ce type d'orientation plutôt qu'une autre. Par exemple il peut y avoir difficulté à choisir MAS (Maison d'Accueil Spécialisé) ou FAM (foyer d’accueil médicalisé). Dans la pratique (actuellement), le coût et les moyens de ces structures sont proches, mais les financeurs ne sont pas les mêmes.
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#8 Message par Jean » mercredi 16 octobre 2013 à 13:20

Réaction de l'ARS Ile-de-France suite a la décision du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise relative a la situation d’Amélie Loquet
"Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a enjoint ce jour le Directeur Général de l'Agence Régionale de Santé (ARS) Ile-de-France de « prendre toutes dispositions pour qu'une offre de soins permettant la prise en charge effective dans un délai de 15 jours de la jeune » Amélie Loquet dans un « établissement médico-social adapté à son état, soit présentée à ses parents ». L'ARS Ile-de-France comprend le désarroi de cette famille confrontée à une situation particulièrement difficile, qui concerne également de nombreuses autres familles en Ile-de France.
L'ARS souhaite rappeler que dans le cadre de ses prérogatives, en l'état du droit, elle ne dispose pas du pouvoir d'imposer l'admission d'une personne dans une structure médico-sociale.
Si l'ARS est bien responsable de l'organisation globale de l'offre de prise en charge régionale, l'orientation individuelle des personnes handicapées relève de la compétence de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Depuis plusieurs années l'ARS a développé des moyens très importants pour améliorer la prise en charge des personnes handicapées en région Ile-de-France (doublement des places de Maison d'Accueil Spécialisées et Foyers d'accueil médicalisés depuis 2007 dans le Val d'Oise). En ce qui concerne la situation d'Amélie Loquet, et malgré son placement dans différentes structures successives, aucune solution pérenne n'a pu être proposée par un établissement de la région.
Pourtant, des places adaptées à la situation de cette personne existent, dans le Val-d'Oise, mais aussi dans un autre département francilien où existe une équipe spécialisée dans la prise en charge du syndrome rare dont souffre cette personne.
Dans l'état actuel du droit, faute de disposer d'un pouvoir d'injonction aux établissements, et pour faire suite à la décision du tribunal administratif, l'ARS, en lien avec la MDPH, prendra contact sans délai avec les établissements identifiés et la famille pour tenter de trouver une solution de prise en charge adaptée.»...

http://www.ars.iledefrance.sante.fr/Rea ... 053.0.html
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Re: L'Etat condamné à trouver un hébergement spécialisé

#9 Message par Jean » vendredi 25 octobre 2013 à 13:42

Condamné à fournir un hébergement à une handicapée, l'Etat renonce à faire appel
Face au scandale, Mme Carlotti annonce un dispositif pour les cas " critiques "

Marche arrière toute. Jeudi 24 octobre, face au scandale qui menaçait, Marie-Arlette Carlotti, la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, a annoncé qu'elle renonçait à faire appel de la condamnation de l'Etat à trouver une place dans un " établissement médico-social adapté à son état " pour Amélie Loquet.

Cette jeune femme de 19 ans, lourdement handicapée, demande un soin de tous les instants. Désespérés de ne pas trouver de structure spécialisée pour s'occuper de leur fille, ses parents avaient saisi la justice. Le tribunal administratif de Pontoise leur avait donné raison, le 7 octobre.

Mercredi, la famille d'Amélie Loquet apprenait dans le même temps qu'une place allait lui être proposée à partir du 4 novembre dans une maison d'accueil spécialisée à Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise)... et que le gouvernement allait faire appel de ce jugement devant le Conseil d'Etat.

" Affront ", " mépris ", " message insupportable "... L'Unapei, la structure qui fédère les associations de défense des personnes handicapées mentales, avait aussitôt critiqué sévèrement cette décision. Elle a été entendue par la ministre, qui a expliqué, jeudi, au risque d'un message un peu brouillé, avoir changé d'avis " par respect des personnes handicapées ".

" Dispositif d'alerte "


" J'ai eu la conviction qu'on pouvait trouver une autre solution ", a insisté Mme Carlotti, sans pour autant dire si elle avait obtenu la réponse aux questions que posait la condamnation du 7 octobre. Pour Mme Carlotti, ce recours ne concernait de toute façon pas Amélie Loquet mais visait à obtenir " une clarification juridique " du rôle de chacun.

Dans sa requête en appel, le ministère disait en effet redouter que la condamnation fasse jurisprudence et " suscite un nombre considérable de demandes auxquelles l'administration ne pourra pas faire face ". Le ministère estimait par ailleurs que ce n'était pas aux agences régionales de santé " d'ordonner à un établissement d'admettre une personne ".

Christelle Prado, la présidente de l'Unapei, s'est dite " soulagée " et " apaisée " par le retrait de l'appel. Pour elle, pas question pour autant de " judiciariser " les cas les plus complexes " si tout est mis en oeuvre par l'Etat " pour venir en aide aux familles.

Mme Carlotti a annoncé la mise en place d'un " dispositif d'alerte et d'urgence " pour gérer les " situations critiques " : création de cellules d'alerte, mise en place d'un comité de suivi national pour examiner les situations complexes... La ministre s'est engagée à faire un " exercice pratique " avec les treize familles qui s'étaient récemment rapprochées de l'Unapei en se disant prêtes à aller en justice.

François Béguin
Le Monde - publié le 25/10/2013
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