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L’Etat condamné à indemniser sept familles pour carences ...

Posté : lundi 31 août 2015 à 14:45
par Jean
Bon résumé dans les actualités sociales hebdomadaires (ASH) du 29/08/2015

L’Etat condamné à indemniser sept familles pour carences dans la prise en charge de leurs enfants autistes

Dans huit jugements rendus le 15 juillet dernier, le tribunal administratif de Paris a condamné l’Etat à verser à sept familles un total de 240 000 € de dommages-intérêts (de 13 164 à 70 000 € selon les cas) en réparation des préjudices qu’elles ont subis du fait « des carences de l’Etat dans la prise en charge des troubles autistiques » que présentaient leurs enfants. L’Etat ayant renoncé à faire appel, ces décisions, saluées par les associations de défense des personnes handicapées(1), sont devenues définitives.

Les parents reprochaient à l’Etat essentiellement un défaut de scolarisation de leurs enfants ou l’absence d’accueil adapté en établissement médico-social. Pour deux des familles, cette carence de prise en charge les avait même poussées à placer leur enfant dans une structure en Belgique. Ces parents demandaient donc à l’Etat la réparation du préjudice subi par eux-mêmes et leurs enfants. Le tribunal administratif de Paris leur a donné satisfaction, en utilisant globalement le même argumentaire pour chacune de ces affaires.

Absence de prise en charge pluridisciplinaire par manque de place

Les magistrats commencent par rappeler que, aux termes de l’article L. 246-1 du code de l’action sociale et des familles, toute personne atteinte du syndrome autistique et de troubles apparentés doit bénéficier, quel que soit son âge, d’une prise en charge pluridisciplinaire qui tienne compte de ses besoins et difficultés spécifiques. Et que l’article L. 112-1 du code de l’éducation pose le principe du droit à la scolarisation des enfants handicapés. Le tribunal ajoute que, « lorsqu’un enfant autiste ne peut être pris en charge par l’une des structures désignées par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) en raison d’un manque de place disponible, l’absence de prise en charge pluridisciplinaire qui en résulte est, en principe, de nature à révéler unecarence de l’Etat dans la mise en œuvre des moyens nécessaires pour que cet enfant bénéficie effectivement d’une telle prise en charge dans une structure adaptée ». Mais, « en revanche, lorsque les établissements désignés refusent d’admettre l’enfant pour un autre motif, ou lorsque les parents estiment que la prise en charge effectivement assurée par un établissement désigné par la commission n’est pas adaptée aux troubles de leur enfant, l’Etat ne saurait, en principe, être tenu pour responsable de l’absence ou du caractère insuffisant de la prise en charge ». En effet, expliquent les magistrats, « il appartient alors aux parents, soit, s’ils estiment que l’orientation préconisée par la commission n’est pas adaptée aux troubles de leur enfant, de contester la décision de cette commission […] devant la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale […], soit, dans le cas contraire, de mettre en cause la responsabilité des établissements désignés ». Enfin, ajoutent-ils, « en l’absence de toute démarche engagée par les parents auprès de la CDAPH, la responsabilité de l’Etat ne saurait être engagée du fait de l’absence ou du caractère insatisfaisant de la prise en charge de leur enfant ».

En s’appuyant sur ces principes, le tribunal administratif a estimé, après instruction de chaque dossier, qu’il y avait eu, pour sept des huit familles requérantes, une carence de l’Etat dans la prise en charge de leurs enfants autistesconstituant une faute de nature à engager sa responsabilité. Ont été considérés comme des carences de l’Etat, par exemple :

→ le fait que, malgré une décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées désignant un établissement d’accueil, la prise en charge pluridisciplinaire n’a pas pu être effectuée faute de placeou n’a pu l’être que de façon insuffisante, entraînant, pour deux des familles, un placement en Belgique ;

→ la scolarisation en école maternelle pour une durée inférieure à celle préconisée par la CDAPH.

Reconnaissance du préjudice d’éloignement

Au final, le tribunal administratif de Paris a condamné l’Etat à indemniser le préjudice moral et/ou financier des familles, et notamment :

→ le préjudice moral subi aussi bien par les parents que par les enfants du fait de l’insuffisante prise en charge en établissement ou de l’absence de scolarisation. Mais aussi en raison de l’éloignement des enfants autistes placés en Belgique, « une première en France », selon l’association Vaincre l’autisme(2) ;

→ le préjudice financier dû à l’impossibilité, pour certains parents, de poursuivre une activité professionnelle ou aux frais qu’ils ont exposés pour le recours à la méthode ABA, à un psychologue ou à une tierce personne.

[TA de Paris, 15 juillet 2015, n° 1416880/2-1, n° 1416868/2-1, n° 1416874/2-1, n° 1416876/2-1, n° 1416881/2-1, n° 1421688/2-1, n° 1422391/2-1 et n° 1422407/2-1 – Disp. sur http://paris.tribunal-administratif.fr]

Les jugements (49 pages)

Re: L’Etat condamné à indemniser sept familles pour carences

Posté : dimanche 24 janvier 2016 à 14:18
par Jean
Éducation : obligatoire ou indemnisable par l'État.
Confrontées à l'absence de solutions éducatives pour leurs enfants, des parents ont fait condamner l'État à les indemniser pour les dépenses qu'ils ont engagées en compensation, et pour leur préjudice moral. Explications.

Le Tribunal administratif de Paris a rendu, le 15 juillet 2015, des décisions aussi intéressantes qu'innovantes. Huit familles avaient saisi cette juridiction afin de voir condamner l'Etat en raison de ses carences dans la prise en charge des troubles autistiques de leurs enfants. Elles demandaient la reconnaissance et l'indemnisation du préjudice de chacun des enfants et parents, ainsi que le remboursement des dépenses éducatives et autres frais engagés.

Sur ces huit familles, le Tribunal a fait droit à la demande de sept d'entre elles, dont cinq avaient reçu des décisions de leur Maison Départementale des Personnes Handicapées orientant leurs enfants vers des établissements médico-sociaux. Mais, faute de place, ces établissements n'ont pu accueillir ces enfants. Pour les deux autres familles, la MDPH avait rendu une décision d'accueil en Belgique. L'Etat n'ayant pas fait appel, ces jugements sont définitifs.

Toutes ces décisions ont été rendues sur les mêmes fondements juridiques, dont l'article L.246-1 du code de l'action sociale et des familles qui a joué un rôle prépondérant : "Toute personne atteinte du handicap résultant du syndrome autistique et des troubles qui lui sont apparentés bénéficie, quel que soit son âge, d'une prise en charge pluridisciplinaire qui tient compte de ses besoins et difficultés spécifiques. Adaptée à l'état et à l'âge de la personne, cette prise en charge peut être d'ordre éducatif, pédagogique, thérapeutique et social."

Pour chaque décision, le Tribunal a posé le principe selon lequel "lorsqu'un enfant autiste ne peut être pris en charge par l'une des structures désignées par la Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées en raison d'un manque de place disponible, l'absence de prise en charge pluridisciplinaire qui en résulte est, en principe, de nature à révéler une carence de l'Etat dans la mise en oeuvre des moyens nécessaires". Dans le même paragraphe et pour chaque décision, le Tribunal pose, ensuite, une exception : "Lorsque les établissements désignés refusent d'admettre l'enfant pour un autre motif, ou lorsque les parents estiment que la prise en charge effectivement assurée par un établissement désigné par la commission n'est pas adaptée aux troubles de leur enfant, l'Etat ne saurait, en principe, être tenu pour responsable de l'absence ou du caractère insuffisant de la prise en charge, lesquelles ne révèlent pas nécessairement, alors, l'absence de mise en oeuvre par l'Etat des moyens nécessaires."

Ainsi, sur la base de ce principe et de cette exception, le Tribunal a examiné chaque demande et chaque période afin de déterminer si une carence de l'Etat était révélée ou non. Le Tribunal administratif a, ainsi, relevé, pour ces sept familles, une carence de l'Etat, pour une ou plusieurs périodes données et a considéré, en conséquence, que cette carence constituait une faute de nature à engager sa responsabilité.

Le Tribunal a condamné l'Etat à payer aux familles et à leurs enfants un préjudice moral, des sommes importantes au titre des demandes indemnitaires et, pour certaines familles, en plus, un préjudice financier. Ces décisions s'inscrivent parfaitement dans la lignée de l'arrêt du Conseil d'Etat du 16 mai 2011 qui reconnaissait déjà le droit à une prise en charge pluridisciplinaire pour les personnes avec autisme, la carence de l'Etat en la matière entrainant l'indemnisation du préjudice d'un jeune autiste et de sa mère.


Alexandra Grévin, avocate au Barreau de Paris, janvier 2016.
http://www.yanous.com/espaces/parents/p ... 60122.html

Re: L’Etat condamné à indemniser sept familles pour carences ...

Posté : mardi 30 avril 2019 à 23:34
par Jean
Autisme - indemnisation du défaut de prise en charge - TA de Lille

Deux décisions du Tribunal Administratif de Lille condamnent l’État à indemniser les parents de deux enfants autistes du fait de la carence de l’État dans leur scolarisation et leur prise en charge. Revue de la procédure, des motifs invoqués, des indemnisations accordées et refusées.

Le tribunal administratif de Lille a rendu le 27 mars 2019 deux décisions concernant la responsabilité de l’État dans l'absence de prise en charge de deux enfants autistes, Rémi et Niels.
https://blogs.mediapart.fr/jean-vincot/ ... a-de-lille