Si je peux me permettre un avis non scientifique, basé subjectivement sur mon expérience de traumatisme, celles de plusieurs personnes très proches de moi, et 18 ans d'échanges sur des forums de santé mentale dans plusieurs langues...
Retrouver un souvenir enfoui est une catastrophe si c'est fait seul. Ca ne sert qu'à raviver la blessure. Ce qui compte c'est de savoir gérer le quotidien, et d'avancer.
Je n'ai remarqué qu'une fois que le souvenir retrouvé avait pu aider très nettement. S'il a aidé, c'est qu'il a permit d'agir, de porter plainte, de se poser en victime, de cesser de culpabiliser sur les comportements qui ont suivi le traumatisme. C'est donc l'énergie passée par cette personne à se reconstruire qui a aidé, le souvenir n'était qu'un déclencheur pour revoir la situation sous un autre angle.
Parfois, ça a aidé un peu, modifié la tournure d'une thérapie, cessé des interrogations constantes, mais le ptsd restait présent. Une atténuation, peut-être simplement parce qu'enfin ces personnes arrêtaient de regarder en arrière et pouvaient regarder devant elles ?
Il me semble que dans ces cas, le dénominateur commun était que le trauma était relativement récent et surtout ponctuel.
Pour les souvenirs oubliés depuis très longtemps ou sur une très longue période, donc particulièrement les violences répétées par des proches pendant l'enfance, remuer les souvenirs peut être catastrophique. Déjà, si c'est enfoui, ce n'est pas pour rien.
Savoir gérer à l'âge adulte la découverte de violences subies, c'est compliqué. Les revivre. Voir des peurs resurgir. Ne plus pouvoir agir légalement, ni confronter son agresseur, ni avoir de témoins, etc. Découvrir que des proches sont coupables ou complices, ou n'ont rien fait.
Gérer sa culpabilité. Par exemple, dans mon cas, quand je me suis souvenue et que j'en ai parlé plus de 10 ans après, d'autres ont commencé à parler ou à se souvenir, y compris la fille de mon agresseur. Mais le monsieur avait donc gardé régulièrement ses petits enfants pendant des années. Je ne sais pas s'il leur a fait du mal, mais j'aurai pu changer le cours des choses...
Un homme de mes connaissances a été maltraité par son père, un vrai sadique. Le reste de sa famille le sait, mais n'ose pas lui en parler. Il a donc vu une psy pour régler ses gros problèmes psy, dont il ignore la cause puisque ses souvenirs d'enfance sont manquants. La psy l'a donc convaincu que c'est sa mère la méchante, ça expliquerait l'éloignement de son père et les troubles.
Un autre, à peu près le même schéma d'enfance, il savait avoir subi des violences, mais n'avait aucun souvenir avant 10 ans. Psy, retour de quelques souvenirs (probablement vrais par recoupement a posteriori). D'une personne relativement stable avec une légère tendance à la dépression, il est devenu anxieux, isolé socialement, agressif dès qu'une situation lui rappelle ce qu'il a vécu.
Personnellement, un psy m'a déjà dit que j'avais subi un traumatisme sévère dans la petite enfance que j'avais refoulé. C'est totalement faux, mais ça expliquait bien les difficultés persistantes depuis aussi loin que je me souvienne.
Mais j'ai échangé avec d'autres personnes qui ont entendu le même discours, et "si le psy le dit, c'est que ça doit être vrai..." Ils n'ont aucun souvenir, aucune preuve, rien qui permette de soutenir cette idée, à part un mal-être actuel.
Je connais aussi des gens avec un ptsd dont la cause n'a pas été oubliée. Au contraire, le trauma est revécu, encore et encore.
La mémoire ne les aide pas.
Il me semble que c'est d'ailleurs le cas le plus courant, d'avoir un souvenir trop présent du trauma.
Une des méthodes utilisées après un événement grave est de... jouer à Tétris. Forcer la concentration pour désaturer la mémoire immédiate permettrait de limiter ou empêcher le stress post-traumatique.
Il me semble un peu rapide de dire que les gens qui ont perdu des souvenirs luttent pour les retrouver donc ce serait la chose à faire. Il me semble qu'il y a une imprégnation culturelle qui pousse à chercher les causes et à regarder derrière soi, je doute fort que ça se passe de la même façon dans d'autres pays, sans même parler de psychanalyse.
lulamae a écrit :L'écriture automatique est un outil intéressant aussi (tu parles à juste titre de "narration").
J'ai cherché et je ne trouve rien au sujet de l'écriture automatique qui ne soit pas des expériences mystiques, ou de la psychologie du XIXème siècle sur le subconscient des hystériques... Tu aurais un lien pour que je comprenne de quoi tu parles ?