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Quel risque de handicap majeur selon l’âge gestationnel des prématurés ?
La prématurité demeure l’une des causes les plus fréquentes de décès néonatals et de complications à court et long terme. Au cours de ces dernières années, la prescription de corticoïdes avant la naissance puis de surfactant a considérablement amélioré le pronostic des prématurés.
Cependant, le risque de complications respiratoires, sensorielles, neurologiques, développementales, et même psychiatriques, augmente de façon notable aux âges gestationnels les plus courts. Une étude américaine sur les enfants d’âge préscolaire a montré que ceux nés à 23-24 semaines avaient en moyenne un quotient intellectuel de 89,1 contre 102,5 pour ceux nés à 25-26 semaines. Une publication française a montré que la proportion d’enfants sans morbidité néonatale sévère à la sortie de néonatologie était de 34 % dans le groupe des enfants nés à 24-26 semaines de gestation, de 81 % dans celui des enfants nés à 27-31 semaines versus 97 % à 32-34 semaines.
Dans cette étude australienne rétrospective à long terme menée dans la province d’Australie occidentale, les chercheurs de Perth ont croisé les données des enfants nés entre 1983 et 2010, sur l’âge gestationnel, les déficits intellectuels, l’autisme, les infirmités d’origine cérébrale, les paramètres de naissance, les décès et les données sociodémographiques. Le terme handicap a réuni les déficits intellectuels, l’autisme et l’infirmité d’origine cérébrale. La méthode de Kaplan-Meier a été utilisée pour estimer par âge gestationnel la probabilité de survie sans handicap jusqu’à 25 ans. Au total, 720 901 naissances vivantes ont été enregistrées sur la période d’étude ; 12 083 enfants ont eu un diagnostic de handicap et 5 662 sont décédés sans aucun diagnostic de handicap. La probabilité à 25 ans de vivre sans handicap était de 4,1 % après une naissance à 22 semaines de gestation, de 19,7 % à 23 semaines, de 42,4 % à 24 semaines, de 53 % à 25 semaines, de 78,3 % à 28 semaines contre 97,2 % pour les enfants nés à 39-41 semaines.
Pour les enfants nés avant 32 semaines, la probabilité de survie sans handicap à 5 ans s’est améliorée avec le temps de 71 % en 1980-89 à 79 % en 1990-99 et 82 % en 2000-2010 (p < 0,01). Une disparité substantielle a été enregistrée aussi avant 32 semaines selon le sexe (plus faible pour les garçons, p < 0,01), l’ethnie (plus basse pour les aborigènes, p < 0,01), le lieu éloigné de résidence (p < 0,01), l’âge maternel (plus faible en cas de mère jeune, p < 0,01), le milieu socioéconomique (p < 0,01).
La probabilité de survie sans handicap à 5 ans, quel que soit l’âge gestationnel, varie beaucoup selon l’ethnie et les autres facteurs de risque : de 4,9 % pour les arborigènes et 10,4 % pour les caucasiens nés à 24-27 semaines considérés comme à haut risque (Apgar bas, sexe masculin, faible statut socioéconomique, lieu de résidence éloigné) versus respectivement 91,2 % et 93,3 % en cas de faible risque (Apgar élevé, sexe féminin, statut socioéconomique élevé, résidence dans une grande ville).
En conclusion, outre l’âge gestationnel, le score d’Apgar, le poids de naissance, le sexe, le statut socioéconomique, l’ethnie maternelle ont une influence majeure sur le taux de survie sans handicap.
Pr Jean-Jacques Baudon