Re: La psychanalyse n'est pas faite pour les autistes.
Posté : mardi 5 août 2014 à 18:50
Ben, on dirait qu'il y a pas mal de psychiatres qui ont à apprendre sur les formes d'autisme.
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Re-Bonsoir,freeshost a écrit :Ben, on dirait qu'il y a pas mal de psychiatres qui ont à apprendre sur les formes d'autisme.
Concernant Pierre Delion, je viens de lire cette lettre que lui adresse Hugo Horiot.1. Dans les années 60, les parents de Sésame Autisme quittent l’UNAPEI.
Ils [les parents] poursuivent la réhabilitation des autistes en famille pendant et après leur adolescence et contrecarrent ainsi une idéologie qui pousse derechef à la séparation familiale, cette fois semi - précoce, bien incarnée par l’Ecole de Bonneuil de la psychanalyste Maud Mannoni.
La matrice de ce premier recul de la profession (sur le plan du maintien des enfants dans leur famille, moteur de sa mobilisation initiale) est qu’elle avait cru guérir les enfants autistes de « leurs troubles de la personnalité » par des « soins intensifs » inspirés par la psychanalyse. Or, devenus adolescents ils ne sont pas guéris. En fait ils sont plus lourds, plus costauds et la sexualité les envahit. Comme la psychiatrie est bien capable de le faire, elle va transférer sa frustration d’une impasse technique et de son manque de moyens en une vague théorie. On préconise la séparation car maintenant les parents seraient cause de la persistance des troubles : ils seraient « incapables de contenir ces jeunes », un leitmotiv qui revient dans les dossiers-patients, les articles et les études de l’époque.
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C’est à cette époque que les adolescents autistes entrent dans un « no man’s land » entre le sanitaire, le médico-social et le social. Cinq mille d’ entre eux sont accueillis « nulle part » selon le rapport d’enquête de l’I.G.A.S. de 1994. Une moitié sort des I.M.E. et l’autre des Hôpitaux de jour pour enfants. En volume, le médico-social et la psychiatrie ont une part égale dans ces rejets. Tandis qu’on reste aveugle à ces conséquences des tranches d’âge limitées dans les institutions, à ces abandons et ces errances des enfants et de leurs parents, un autre concept justificateur se répand, celui de « la discontinuité thérapeutique ». En ne prévoyant pas une suite institutionnelle à leur parcours, on donnerait une meilleure chance à ce que leurs capacités ou leurs désirs émergent : établir une filière et des relais serait psychiquement enfermant. Or, c’est à cause de cette négligence que, devenus adultes, beaucoup seront de retour physiquement dans des services asilaires, reconstituant l’horrible « défectologie » des années 50.
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Avec le recul, peut-on supposer qu’à l’intérêt éthique de faire sortir les enfants de l’asile dans les années 60 se rajoutait, pour la pédopsychiatrie hospitalière, l’intérêt d’en sortir elle-même avec eux pour s’installer en ville, dans les « secteurs de psychiatrie », comme une aubaine. Une fois installée dans la cité, elle les a oublié à leur sort tandis qu’ils sont devenus grands, abandonnés ou mal orientés, souvent mal accueillis par la psychiatrie des adultes, parfois maltraités.
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2. Dans les années 80, les parents d’Autisme France quittent Sésame Autisme.
Apres la dissidence des années 60 (celle de Sésame Autisme donc, qui s’est séparé de l’UNAPEI) est apparu dans les années 80 - 90 un autre embranchement, celui des jeunes parents d’ "Autisme France", qui se séparent à leur tour de Sésame. Ils lancent un mouvement pour l’éducation des enfants et pour l’intégration scolaire.
S’opère alors un déplacement du regard, inverse de celui des années 60. Pour éliminer plus radicalement le risque asilaire, ce mouvement qui rassemble avec eux des professionnels et des administrateurs veut exclure l’autisme du champ de la psychiatrie. Il l'argumente par la prééminence des "troubles de la cognition" sur ceux de la « personnalité », du handicap sur la maladie, de l’organogenèse sur la psychogenèse. La pédagogie comportementale, la génétique et la recherche sont mises au premier plan.
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Le changement que les psychiatres et les psychanalystes ne distinguent pas clairement alors est que la radicalité anti-asilaire est maintenant assumée par les associations de parents et non plus par les organismes professionnels ou institutionnels.
Et c’est seulement au bout de quinze ans que cette pression familiale et sociale va faire réagir le monde politique. La Circulaire Veil de 1995, qui établit l’autisme comme priorité de santé publique dessine un nouveau protocole de coopération sanitaire, médico-sociale et éducative. Dorénavant, il y aura pour l’autisme en France un avant et un après cette Circulaire.
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3. Dans les années 2000, une troisième vague de parents amène d’autres pôles de revendications.
Entre temps, dans les années 2000, une troisième vague de dissidence, plus intraitable encore que les précédentes, est apparue. Les nouveaux parents militent pour la prise en charge ultra précoce des enfants, ce que des savoirs scientifiques récents rendent incontournable. Ainsi, ils espèrent une amélioration rapide qui rendrait crédible, et plus tard effective, l’inclusion scolaire et sociale revendiquée aussi avec vigueur.
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Mais malgré eux les vieux démons « suprémacistes » s’imposent encore et encore. Tandis que les jeunes parents montrent dans les medias leur exaspération due aux mensonges d’état, à l’absence ou au retard quant aux moyens de la prise en charge précoce des petits autistes, ce que la psychiatrie dénonce peu (beaucoup moins que les associations), des psychanalystes vont sur les mêmes ondes pontifier sur « les mères crocodiles » et « leurs fantasmes cannibales ». Le parallélisme des discours et le malentendu sont à leur comble entre d’une part le ressentiment familial et social sur les parcours et d’autre part l’emphase de certains discours psychanalytiques emplis de jouissance littéraire ou de bons mots.
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4. Depuis 2010, est-ce une quatrième vague ?
J’ai commenté précédemment la responsabilité des politiques et des administrations, notamment depuis 2012. Rappelons seulement qu’après une période de déni, celle des années 80, il y eut dans les années 90 la reconnaissance de l’ autisme comme priorité de santé publique, et que, entre 2010 et 2014, on observe des embardées erratiques et des manipulations dans les ministères, de Sarkozy puis de Hollande, en interaction avec une quatrième vague de contestation parentale. Des regroupements s’établissent temporairement autour d’approches qui s’autoproclament souveraines ou uniques. Mais derrière cette façade d’unité, une guerre commerciale féroce, notamment pour dispenser des formations, aiguise des surenchères et des rivalités y compris entre associations familiales.
Petite histoire de la critique de la psychanalyse et de la psychiatrie C’est le discours de la ministre Marie-Arlette Carlotti en juin 2013 sur « les méthodes qui marchent » et qui « seules seront financées » qui leur a frayé un chemin. Cette bévue s’est abritée derrière la dernière Recommandations de la HAS. Après celle de 2005 (pour les diagnostics), consensuelle, celle de 2012 (pour les pratiques) a valorisé à l’excès des « preuves scientifiques» très contestables, afin de donner cette fois la suprématie à des approches comportementales. Cette capitulation devant des lobbyings est à la source d’abus qui imposeront sans doute des arbitrages juridiques. Nous savons cependant que les personnes autistes, qui présentent une grande diversité, vont résister aux tentatives d’uniformiser les accompagnements.
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L’apport de la psychologie du développement [7] et la compréhension des déséquilibres sensori-moteurs variés (le corpus moderne du suisse André Bullinger [8]) est essentiel pour la prévention précoce et la rénovation de la clinique. Il montre les failles de la régulation tonico- émotionnelle dans l’enfance, puis dans le présent de l’adolescent et de l’adulte, et comment elles génèrent des troubles des conduites, permanents ou des aggravations conjoncturelles. Ces failles existent quel ques soient les niveaux intellectuels associés à l’autisme, chez les plus déficitaires comme chez les personnes « avec un haut niveau » ou dans les syndromes d’Asperger. Auparavant prédominait à l’inverse l’idée qu’une «souffrance psychique » était le primum movens, l’initiateur pour la plupart des blocages y compris physiques. Cette représentation-là, encore majoritaire il y a peu, est maintenant révisée par toutes les disciplines. Remarquons que les psychanalystes Pierre Delion et Genevieve Haag, ainsi que M-F Livoir-Petersen contribuent aujourd’hui à cet apport en y versant leurs propres expériences.
L’apport du cognitivisme moderne (notamment le corpus du franco-québécois Laurent Mottron [9]) a des incidences majeures sur la clinique. Par exemple, il permet de comprendre comment une personne subit l’emprise de séquences de pensées ou de séquences d’actions déjà connues et qui doivent être réalisées derechef avant d’amorcer des conduites nouvelles ou adaptées ; les difficultés à circuler simultanément dans plusieurs séquences de pensée, d’action, et d’émotions ; la concentration de ces personnes difficile à détourner ; les gênes intellectuelles et physiques ressenties lors des interactions avec les autres, etc. Dans certains cas, le cognitivisme nous permet aussi de comprendre que le langage peut être un leurre qui crée des relations pathologiques avec l’entourage, et que certains autistes « verbaux » ont des conduites plus adaptées s’ils sont assistées comme des non-verbaux. Là encore, ce ne sont que quelques exemples. Ils sont mentionnés ici au titre du diagnostic différentiel : ces troubles des conduites sont souvent attribués faussement à des dimensions psychologiques communes, non spécifiques.
Source : Regard scientifique sur la psychanalyse avec Joël Swendsen...Spoiler : TenL#58 :
Il faudrait intervertir le g et le bOn n'est pas sorti de la berge ...
Spoiler : :
Ce documentaire a était censuré et à juste titre. La journaliste a manipulé les propos des psychanalystes interrogés au moment du montage vidéo, de manière à pouvoir les incriminer. C'est bas je trouve...Jean a écrit :Modération (Tugdual) : Fusion de sujets (début).
Autisme : la psychanalyse au pied du mur
L'autisme a beau être la grande cause nationale de 2012, les familles qui y sont confrontées restent démunies. Car, en France, les psychanalystes s'opposent aux méthodes comportementalistes ayant pourtant fait leurs preuves à l'étranger. Une position rétrograde dénoncée par Sophie Robert dans un documentaire, "Le Mur", dont la diffusion est suspendue à la décision d'un tribunal, le 26 janvier. Par Laure Mentzel - "Le Monde- Magazine 14/01/2012
Sur l'écran, une grand-mère à col Claudine enfourne son bras entre les mâchoires d'un crocodile en plastique. Cette pédopsychiatre chevronnée mime devant la caméra le concept lacanien de "mère crocodile" - envahissante et castratrice - qui a autrefois expliqué les causes de l'autisme. Dans les années 1950, on considérait avec Bruno Bettelheim et Jacques Lacan que cette pathologie résultait d'un trouble de la relation mère-enfant. A l'heure où le monde entier tient pour acquise l'origine neurobiologique du handicap et la nécessité de rééduquer les enfants qui en sont atteints, la professionnelle expose son approche sans ciller : ce qu'il faut soigner avant tout, c'est la "folie maternelle". A en croire le documentaire Le Mur de Sophie Robert dont est extraite cette scène, les psychiatres français seraient dépendants des théories psychanalytiques, considérées partout ailleurs comme obsolètes pour le traitement de l'autisme. Les paroles de psychiatres se succèdent et accablent surtout ceux qui les prononcent : parents forcément coupables du handicap de leur enfant, retard de langage dû à un désir de "rester dans l'oeuf", absence de solution, rejet de l'idée même de progression... Le film glace et agace. N'y a-t-il donc aucun psychiatre digne de ce nom en France ? Les découvertes des neurosciences et les thérapies cognitives et comportementalistes, qui ont fait leurs preuves dans les pays anglo-saxons et scandinaves, s'arrêtent-elles comme le nuage de Tchernobyl à nos frontières ? Le 8 décembre dernier, on en débattait au tribunal de Lille. Sophie Robert y était assignée par certains des professionnels interviewés désireux de faire interdire Le Mur.
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Modération (Tugdual) : Limitation de la grande citation.
Grave erreur. Le film a été finalement autorisé, et il a été clairementKing_Autistitch a écrit :Ce documentaire a était censuré et à juste titre. La journaliste a manipulé les propos des psychanalystes interrogés au moment du montage vidéo, de manière à pouvoir les incriminer. C'est bas je trouve...
Autant pour moiTugdual a écrit :Grave erreur. Le film a été finalement autorisé, et il a été clairementKing_Autistitch a écrit :Ce documentaire a était censuré et à juste titre. La journaliste a manipulé les propos des psychanalystes interrogés au moment du montage vidéo, de manière à pouvoir les incriminer. C'est bas je trouve...
établi que les propos des psychanalystes n'ont pas été manipulés,
ceci étant prouvé par l'analyse des rushes. Voir tous les détails ici.