Être en couple, est-ce possible pour les autistes ?

Je suis autiste ou Asperger, j'aimerais partager mon expérience. Je ne suis ni autiste ni Asperger, mais j'aimerais comprendre comment ils fonctionnent en le leur demandant.
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olivierfh
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#151 Message par olivierfh » samedi 25 novembre 2017 à 22:11

misty a écrit :la cohabitation est trop compliquée pour moi; entre autres parce qu'elle donne au partenaire une illusion de disponibilité qui ne correspond pas à la réalité.
Le partenaire doit être conscient du niveau de disponibilité et nous aimer tel qu'on est, ce n'est pas impossible (mais a parfois été difficile pour moi).
TSA de type syndrome d'Asperger (03/2017) + HQI (11/2016).
4 enfants adultes avec quelques traits me ressemblant, dont 1 avec diagnostic TSA et 1 au début du parcours de diagnostic.

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mickeythegoldfinder
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#152 Message par mickeythegoldfinder » dimanche 26 novembre 2017 à 0:13

desolé je suis nouveau et pas diagnostiqué et j'ai pas la patience de tout lire
moi j'ai 39 ans et je suis sexuellement a 0 meme pas un bisoux dans toute ma vie
et je n'ai aucun espoir espoir ni aucun desir avec les femmes
( c'etait une parenthese pour vous divertir )
non je suis pas diagnostiqué mais j'ai des resultats tres elevés aux tests des aspies

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misty
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#153 Message par misty » dimanche 26 novembre 2017 à 15:07

olivierfh a écrit :
misty a écrit :la cohabitation est trop compliquée pour moi; entre autres parce qu'elle donne au partenaire une illusion de disponibilité qui ne correspond pas à la réalité.
Le partenaire doit être conscient du niveau de disponibilité et nous aimer tel qu'on est, ce n'est pas impossible (mais a parfois été difficile pour moi).
Ce n'est pas le tout d'en être conscient, il faut l'accepter jour après jour et accepter aussi que ça ne changera pas. En être conscient est une chose, le rester lors de périodes où on est très fragilisé en est une autre.
Je crois que c'est possible oui, mais ça dépend de beaucoup de choses. Un facteur qui n'a pas été évoqué dans les messages précédents, c'est le partenaire. Je pense que la possibilité d'être en couple dépend autant de la personne TSA que de la personne en face.
Une autre variable serait les évènements rencontrés par le couple, les choses à traverser. Là encore, c'est important: je crois que rester en couple implique de savoir évoluer ensemble, et d'être chacun suffisamment "solide" de son côté pour garder son couple solide. La vie étant rarement une "promenade de santé", ça me semble dur autisme ou pas.

Je suis consciente d'être dans une situation très particulière, mais pour autant je suis lucide et même dans le cas de problématiques moins graves, je serais je pense plus équilibrée avec mon espace, mes repères et mes temps bien cadrés. J'ai la sensation que pour donner le meilleur de moi-même je dois éviter de tomber dans le piège du "vampirisme" courant avec les gens très dépendants ou qui misent énormément sur le couple et le partenaire (factuellement ça me paraît être le cas de beaucoup de gens).
Je me demande si l'amour n'implique pas une part de "oui elle est comme ça mais avec moi ce sera différent"...
*Diag TSA*

***Nullius in verba***

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hazufel
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#154 Message par hazufel » dimanche 26 novembre 2017 à 15:48

misty a écrit :Je crois que c'est possible oui, mais ça dépend de beaucoup de choses. Un facteur qui n'a pas été évoqué dans les messages précédents, c'est le partenaire. Je pense que la possibilité d'être en couple dépend autant de la personne TSA que de la personne en face.
Je pense aussi que c’est la chose essentielle. Comme nous sommes souvent influencés par ceux qui nous portent de l’attention, parce qu’on en a souvent manquée, je dirais qu’il est facile de tomber dans ce panneau là. Super, celui ou celle là veut bien de moi, je garde. Sans qu’il ou elle nous corresponde pour autant.
misty a écrit :Une autre variable serait les évènements rencontrés par le couple, les choses à traverser. Là encore, c'est important: je crois que rester en couple implique de savoir évoluer ensemble, et d'être chacun suffisamment "solide" de son côté pour garder son couple solide. La vie étant rarement une "promenade de santé", ça me semble dur autisme ou pas.
Oui, c’est dur en général. Avoir des projets communs, une vision d’avenir commune, ça ne se construit pas facilement. D’autant plus lorsque des obstacles apparaissent. Il est facile alors de bifurquer sur des chemins différents finalement. Ça peut être un enfant, un diagnostic, une période de chômage, etc.
misty a écrit :Je me demande si l'amour n'implique pas une part de "oui elle est comme ça mais avec moi ce sera différent"...
Je trouve qu’à partir du moment où on se dit ça, l’amour n’est tout simplement pas possible à long terme. Au début tout est sympa, forcément, mais nul n’a le pouvoir de changer qui que ce soit. Vouloir changer l’autre pour le faire convenir à son attente, n’est pas l’aimer.
Et ça arrive très souvent, quelques soient les particularités des couples.
Reprocher à un autiste au bout de 5/10 ans qu’il n’est vraiment pas sociable et trop casanier, ce n’est pas ne plus l’aimer. C’est ne pas avoir compris qu’il est intrinsèquement ainsi. C’est ne pas l’avoir vu tel qu’il est mais l’avoir imaginé tel qu’on l’aurait voulu.
Être autiste n’est pas une tare, nous ne sommes pas psychopathes. Nous sommes capables de ressentir, souvent plus fort. Ce n’est pas parce qu’on ne l’exprime pas ou différemment qu’on ne le vit pas. Être autiste n’empêche pas d’être fidèle, tolérant, ni digne de la plus grande confiance. J’en ai assez des témoignages de ceux qui nous voient comme des sans cœurs, froids et distants comme j’ai pu lire dernièrement, il n’y a pas qu’une façon de fonctionner encore moins une seule d’aimer.
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#155 Message par philigram » dimanche 26 novembre 2017 à 18:35

Le conjoint peut aussi évoluer. Ce qui lui était supportable peut devenir insupportable. C'est aussi vrai dans les couples NTs.
Il y a des phases clés : l'arrivée des enfants, la quarantaine ou cinquantaine pour certains, la retraite, la perte de son boulot, un accident ...
Et puis le simple fait de vieillir peut aussi faire que l'autre, et ses défauts, devient ingérable.
Perso, je pense qu'il est plus difficile pour ma conjointe de me supporter que moi de la supporter !
Mais ce qui est certain, c'est qu'on a tous les deux évolué, et pour le moment les chemins ne se séparent pas trop et reste un socle qui est peut-être bien l'autisme !
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hazufel
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#156 Message par hazufel » dimanche 26 novembre 2017 à 19:34

Évoluer ne veut pas dire changer pour moi.
Et oui, l’essentiel est de maintenir un cap commun. C’est difficile, on n’y arrive pas souvent du premier coup, ça demande des efforts mais pas de se battre contre soi même. Sinon l’échéance est de se perdre soi même. La vie est courte.
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#157 Message par philigram » dimanche 26 novembre 2017 à 20:53

hazufel a écrit :Évoluer ne veut pas dire changer pour moi.
Je pense que la vie nous fait évoluer et nous peut nous changer. Un événement peut nous faire prendre conscience de certaines choses. Alors qu'on baigne dans un confort qui convient aux deux, il est possible un jour de prendre conscience suite à un tragique événement, que la vie est courte justement et vouloir du jour au lendemain tout faire péter. Le conjoint ne reconnait plus l'autre. C'est arrivé dans ma famille : passer du confort à l'extrême.
Perso suite à une dépression, j'ai abandonner mon boulot, je me suis retrouvé à la maison. J'étais pourtant cadre-dynamique et qui croyait que l'individu se définissait par son métier et son boulot. Ma conjointe a du accepter cette situation, ce changement de vision de la vie, de l'individu et de statut. Bien d'autres membres de la famille n'acceptent pas ce changement, ou ne comprennent pas et préfère ne pas en parler.
De mon point de vue, c'est un changement radical, et aussi une évolution positive. Mais pour certains, c'est une déchéance : avoir fait ces études, avoir ces diplômes et ne pas bosser est un sacrilège.
Mais bon, on joue sur les mots. On est plutôt d'accord sur le fond :)
Diagnostiqué asperger avec anxiété sociale marquée par le CRA.

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Anahata
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#158 Message par Anahata » jeudi 30 novembre 2017 à 23:21

Et deux Aspies ensemble ça fait quoi ? Ça marche des fois ?
:arrow: Diagnostiquée sur le Spectre de l'Autisme :shock: :D :? :cry: :innocent: :wink: :geek: :arrow:

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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#159 Message par mashka » vendredi 1 décembre 2017 à 9:20

J'ai vécu avec un asperger. Une catastrophe. Naïvement je pensais que l'on allait se comprendre et que tout serait naturel. Je ne pensais pas qu'un aspi pouvait être pot de colle eh bien cet homme était tout l'inverse de moi... Il était étouffant. L'horreur. Ça n'a pas duré bien longtemps.
Le problème en ce bas monde est que les imbéciles sont sûrs d’eux et fiers comme des coqs de basse cour, alors que les gens intelligents sont emplis de doute.
Diagnostiquée asperger+HP

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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#160 Message par fractal » vendredi 1 décembre 2017 à 10:15

Ca dépend beaucoup. Je connais un couple de présumés aspies, ça marche très très bien d'après eux. Mais c'est un peu comme les neurotypiques je pense, faut tester, et ça dépend des tempéraments des 2 côtés.
TSA
Pour info, ca m'a pris 2 ans 1/2 a Chenevier Mondor

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Anahata
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#161 Message par Anahata » vendredi 1 décembre 2017 à 11:09

Ça c'est cool :love:
:arrow: Diagnostiquée sur le Spectre de l'Autisme :shock: :D :? :cry: :innocent: :wink: :geek: :arrow:

apache
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#162 Message par apache » dimanche 3 décembre 2017 à 17:59

Bonjour,
Je n'ai aucun diagnostic, mais je ne suis quand même pas facile à vivre avec mon anxiété généralisée et mes bizarreries. C'est pourquoi je me permet de venir dans cette discussion. Je suis mariée depuis 4 ans, et nous avons 2 enfants.
Au niveau physique, au début de notre relation, mon actuel mari trouvait très étrange que je n'aime pas les caresses ou encore embrasser sur la bouche. Avec le temps, j'accepte un peu les caresses, mais je ne supporte toujours pas qu'il m'embrasse. Cependant il l'accepte bien.
Niveau caractère, j'ai un grand besoin d'indépendance et d'isolement : cela a été un peu compliqué pour que nous trouvions notre équilibre l'un par rapport à l'autre... et puis finalement ça lui convient bien, car cela lui laisse le champs libre pour passer des soirées avec ses potes ou vaquer à ses propres activités. Je ne suis jamais "sur son dos". Le plus gros problème concerne nos sorties extérieures, parfois je me demande s'il ne préférerait pas une femme plus sociable, capable de passer 2h au supermarché, puis 2h au resto d'enchaîner sur une soirée en boîte :lol:
Et pour finir, mon mari a toujours du mal à comprendre mes routines ! J'imagine que certains de mes comportements l'agacent considérablement. Il arrive que ce soit un sujet de dispute, mais c'est un point sur lequel j'ai du mal à évoluer.
TSA de type syndrome Asperger

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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#163 Message par julien-asse-42 » mercredi 6 décembre 2017 à 18:26

Bonjour,

Je ne suis pas diagnostiqué mais en attente. Une psy m'a renvoyé au centre d'autisme réaccord de Saint-Etienne. J attends le premier rdv.

J'ai un manque affectif et une sensibilité bcp trop prononcé. Je me suis reconnu dans un témoignage et j'ai une vision de l'amour bizarre.
J'ai 24 ans et je crois seulement en l'amour fusionnel. Je crois en un grand attachement et dévouement l'un pour l'autre.
J'ai du mal a concevoir qu'a 30 ans on peut avoir eu dit je t'aime a 5 personnes, pour moi l'amour qu on porte a une personne c'est pour la vie.
J'ai du mal a comprendre les gens qui sont en couples avec des personnes qui sont objectivement physiquement pas attirantes. Je ne m'imagine en couple seulement avec une fille qui me plait bcp physiquement, et que ce soit réciproque.
Je sens parfois dans les relations de couples plus une relation amical, pour se rassurer.

Ma premiere et seule fille avec qui j'ai eu une relation c'était a 23 ans. C'était insensé, nous couchions ensemble alors qu'elle avait un copain. Moi je découvrais tout ca j'étais perdu mais commencais a énormement apprécier la compagnie de la fille sans savoir l'exprimer ( et meme le comprendre moi-meme ).
Au bout de 20-30 jours elle m'a signifié qu'elle ne souhaitait plus qu'on se revoie et qu'elle a fait le choix de rester avec son copain. Je vais passer outre les comportement bizarres que j'ai pu avoir pendant ce temps-la, ce qu'il m'a le plus étonne c'est ma réaction suite a ce rejet.
Je me suis vraiment senti trahi, déchiré en 2. Je comprends pas comment on peut faire l'amour 10 fois avec une personne, lui donner tant d'attention pour tout balayer d'un simple revers du jour au lendemain.
Aujourd'hui 18 moi apres ca me pese encore, je me sens dans un grand manque affectif. Je suis obsédé par cette fille ou une relation de couple. Je revasse et invente des scénario... Seulement je suis incapable de parler en groupe, de séduire, alors j'ai l impression que je pourrai jamais combler mon vide.
24 ans, non diagnostiqué. En attente du premier rdv avec le centre REHACOOR 42, lieu d'évaluation et d'accompagnement autisme haut niveau le 31 Janvier.

tristaspiration
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#164 Message par tristaspiration » vendredi 22 décembre 2017 à 18:13

Il y a plus de quatre ans, je suis sorti avec une fille durant quelques mois - elle a fini par me quitter, mais "ce n'était pas de ma faute", selon elle. Il faut dire qu'à ce moment là, je ne me sentais encore si différent du reste du monde, c'est donc plausible qu'elle ne m'ait pas quitté "à cause de moi".

Depuis, j'ai changé. Ou plutôt, j'ai remarqué qu'un écart se creusait entre moi et les autres. En revanche, ce qui n'a pas changé, c'est l'amour que je porte à cette fille. Désormais, nous nous revoyons un peu, et souvent à son initiative. Voici ce que je m'apprête à lui envoyer par courrier :

"Qui aimes-tu ?

Je crois que je n’avais jusqu’alors jamais vraiment saisi la portée de cette question. Comme tout le monde, il m’arrive de déclarer que j’aime les membres de ma famille — sans oublier le piranha à quatre pattes. Comme tout le monde, je peux dire que j’apprécie la compagnie des personnes avec qui je partage du temps une fois tous les deux mois autour d’un verre de vin. Pourtant, aussi sincères qu’ils soient, je crains que ces mots ne puissent répondre à notre question.

Qui aimes-tu ?

Quand on y pense, la formule est si souvent employée qu’elle y perd son sens. Je me suis déjà surpris à avouer à des amies que je les aimais, ou plutôt, à leur expliquer que je croyais les aimer, mais qu’en réalité, je n’en savais rien, et que j’en étais désolé. Aussi nombreuses que ces situations maladroites aient pu être, aucune d’entre elles n’a donné lieu à autre chose que de l’éloignement, de l’indifférence et de la solitude. J’ai du mal à croire que l’amour puisse être à l’origine de ces malheureux évènements : du peu que j’en ai compris, il est le règne du partage, et non de l’abandon. N’as-tu pas toi-même lu que l’amour était source de bonheur, mais que pour être véritable, celui-ci devait être partagé ?

Mais alors, quel était ce pernicieux ressenti qui, tout en se présentant à mon esprit comme un sentiment amoureux, s’est avéré être un leurre néfaste ? Comment a-t-il pu s'immiscer entre ma conscience et mon cœur sans que je m’en rende compte ?

Certains font mention d’un royaume où nul sujet ne peut vivre sans être trompé par cette illusion d’aimer. Peut-être que j’y habite. Peut-être même que nous y habitons tous. T’imagines-tu ce que cela voudrait dire ? Ce que nous appelons ordinairement “amour”, ce que nous portons en fait à nos compagnons de vie, ne serait qu’un vulgaire miroir aux alouettes, reflétant volontiers les intentions malsaines des pervers comme l’immaturité coupable des gens de bonne foi.

Même si ces mots sont durs, je te prie de ne pas y lire du désespoir.

Aussi incongru que cela puisse paraître, on dit de ce royaume qu’il accueille une principauté où cette illusion d’aimer laisse place à un amour véritable. Mais, paraît-il, seuls y résideraient ceux qui y sont nés. Pourquoi une telle injustice, me diras-tu ? Comment l’amour pourrait-il être leur apanage ?

Pour que ta compréhension de la chose soit plus juste, je me dois de te partager l’avis des sages. Ceux-ci racontent qu’en vérité, tous les habitants du royaume (dont ceux de la principauté) peuvent ressentir l’amour authentique comme le leurre qui en revêt les oripeaux. Ce qui distingue les habitants de la principauté, ce donc n’est pas leur immunité à ce leurre — au contraire, leur manque de discernement en la matière est remarquable —, mais l’intensité de l’amour qu’ils manifestent.

On dit de ces habitants qu’ils sont capables d’aimer la même personne pendant plusieurs années, et de retenir les moindres dates d’événements passés avec l’être aimé. On dit également d’eux que leur amour s’étend bien au-delà des êtres qu’ils chérissent et qu’ils offrent un traitement juste à tous les êtres sensibles.

Encore une fois, tu pourrais me demander comment une telle injustice peut se produire. Comment cet amour si pur, ce privilège, saurait-il être leur propriété ? Eh bien, j’ose avec toi espérer qu’ils n’en aient pas le monopole.

En revanche, toujours selon les sages, les habitants de cette principauté ont bien des caractéristiques qui leur sont spécifiques. Même si leur amour est incommensurable, il leur est très difficile de l’exprimer, même quand ils ont réussi à en prendre connaissance et à s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’un trompe-l’œil. Généralement, ils ne savent tout simplement pas comment s’y prendre. A cela, il faut ajouter leur importante anxiété, qui cache une peur du rejet, ainsi qu’un profond manque de confiance. Mais ce n’est pas tout : les habitants de la principauté croient qu’ils n’ont pas le droit au bonheur. Et quand ils l’ont trouvé ? Ils semblent incapables de le garder : c’est comme si pour eux, les relations amoureuses et encore plus celles de longue durée étaient une langue barbare. Il en résulte que ceux-ci vivent en majorité dans la solitude.

Tout le monde se sent un peu seul, me diras-tu. C’est vrai. Cependant, les sages racontent que la solitude des habitants de la principauté est sans commune mesure. Même lorsqu’ils sont avec d’autres personnes, une bulle de verre — imperceptible au premier coup d’œil — les tient à l’écart. S’ils tentent de la percer dans un effort pénible de travestissement, celle-ci éclatera effectivement l’espace d’un instant, mais se reformera aussitôt. On dit de cette prison à ciel ouvert qu’elle est à la fois leur meilleure chance de se développer mais aussi la cause de leur malheur. Pourquoi donc ? Parce que pour aller vers l’autre, ils doivent s’extraire à jamais de cette bulle, ce qui leur est impossible. Ceux qui comprennent cela ont gravement l’âme en peine : ils ne comprennent pas l’absurdité qui régit les relations humaines, ni même l’intérêt de poursuivre leur chemin dans cette débâcle. Pour eux, le quotidien n’a aucune saveur et le lendemain sera fait de noirceur.

Pourtant, relatent également les sages, tous les habitants de la principauté ne sont pas condamnés à cette existence sans joie. On dit notamment d’un jeune habitant qu’il aurait pu, non briser la bulle, mais rencontrer une femme aussi douce qu’elle parvint à s’y introduire sans la faire éclater. Ses talents seraient si développés que par son charme naturel, elle parviendrait à libérer le jeune homme de l’indifférence au monde qu’il cultive ; à le délivrer de son angoisse existentielle ; à le rendre heureux rien que par sa présence ; à lui donner le sentiment que tout dans son royaume n’est pas absurde, mais que peut-être il y a quelque sens à vivre, à s’ouvrir à l’autre, à aimer.

De la véracité de cette histoire je peux t’en donner la confirmation, puisque c’est la mienne.

Avec toi j’ai compris ce que je voulais dire aimer. Merci pour tout. "
Non diagnostiqué. Je me reconnais assez dans le syndrome d'Asperger, sans pour autant me prononcer sur mon éventuelle atteinte.

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olivierfh
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Re: Être en couple, est-ce possible pour les aspies ?

#165 Message par olivierfh » jeudi 28 décembre 2017 à 16:57

:love: Jolie lettre, espérons une réponse favorable.
TSA de type syndrome d'Asperger (03/2017) + HQI (11/2016).
4 enfants adultes avec quelques traits me ressemblant, dont 1 avec diagnostic TSA et 1 au début du parcours de diagnostic.

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