Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

Toutes discussions concernant l'autisme et le syndrome d'Asperger, leurs définitions, les méthodes de diagnostic, l'état de la recherche, les nouveautés, etc.
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Re: Hans Asperger et le nazisme

#46 Message par Benoit » vendredi 20 avril 2018 à 0:52

Il y a deja un fil sur le sujet, et ces faits etaient a peu pres deja connus (mais pas autant sources).

Deux points sur le sujet de l'article avec Silberman.
1. Je ne crois pas que les gens s'identifient au SA en France. Il fait partie de nous mais il n'y a pas d'effet 'communautaire' ni du coup de risque pour les gens qui se seraient identifies de façon exclusive au SA.
2. Les anglo saxons ont ceci de particulier qu'ils n'ont jamais ete occupes dans la derniere guerre. Ca leur donne une vision probablement differentes de ce que pouvait etre la vie sous un regime nazi. (enfin, en esperant que leur connaissance historique ne sorte pas de chez Marvel, parce que j'ai des doutes quand je lis SuperVillain...)

La partie de l'entretien qui ne traite pas de ces questions historiques m'a semblee plus interessante.
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#47 Message par Meddio » vendredi 20 avril 2018 à 7:58

Il est clair que n'être pas nazi à l'époque, c'était encourir le risque de perdre beaucoup. Beaucoup, de façon pragmatique ont privilégié leur situation - pour la sauvegarde de la condition de leurs propres enfants par exemple.

De plus, les nasis, et c'est peut-être le plus dur à se dire, étaient des humains comme les autres, endoctrinés par un système qui les a dépassés - je renvoie à la lecture du Silence de la mer de Vercor qui est très éloquent pour ça. Il raconte l'histoire d'une famille contrainte d'héberger un nazi et qui se rend compte petit à petit que les nazis sont .... Humains. Et que, s'ils étaient nés en Allemagne, par exemple, ils en auraient sans doute été.

Bien sûr, tout cela n'excuse pas les cadre, ceux qui ont contribué à mettre en place ce système, les membres du Reich et ceux qui ont organisé l'élimination systématique des handicapés, des juifs, des tziganes et des homosexuels. Mais je pense qu'il faut tout de même relativiser.


De plus, cela ne remet pas en cause les travaux de l'homme.

A ce titre, l'exemple de Richard Strauss est pertinent : malgré la position qu'il a occupé pendant le Reich, pouvons-nous dire que son œuvre musicale est d'une piètre qualité (ce qui fait écho au cas Céline cité plus haut) ?

Ps : de plus, je ne vois pas bien quelle incidence ça a sur le SA. On ne se demande pas quelles sont les opinions politiques de ceux qui ont théorisé les maladies dont on peut être atteint, les inventions dont on peut se servir, etc. Asperger ne lui appartient pas, c'est le nom qu'on a donné à posteriori à un syndrome qu'il a étudié.
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#48 Message par Benoit » vendredi 20 avril 2018 à 9:31

C'est litéralement la conclusion de l'article publié dans les pages "opinion" du NYTimes, par l'auteur du livre (pas de la publi) qui est américaine.
Does the man behind the name matter? To medical ethics, it does. Naming a disorder after someone is meant to credit and commend, and Asperger merited neither. His definition of “autistic psychopaths” is antithetical to understandings of autism today, and he sent dozens of children to their deaths.

Other conditions named after Nazi-era doctors who were involved in programs of extermination (like Reiter syndrome) now go by alternative labels (reactive arthritis). And medicine in general is moving toward more descriptive labels. Besides, the American Psychiatric Association has ruled that Asperger isn’t even a useful descriptor.

We should stop saying “Asperger.” It’s one way to honor the children killed in his name as well as those still labeled with it.
Spoiler : Traduction : 
Est-ce que l'homme derrière le nom est important ? Pour l'éthique médicale, oui. Nommer un trouble d'après quelqu'un est censé créditer et recommander, et Asperger n'a mérité ni l'un ni l'autre. Sa définition de "psychopathes autistes" est contraire à la compréhension de l'autisme aujourd'hui, et il a envoyé des douzaines d'enfants à leur mort.

D'autres conditions nommées d'après des médecins de l'ère nazie qui étaient impliqués dans des programmes d'extermination (comme le syndrome de Reiter) sont maintenant étiquetées par des étiquettes alternatives (arthrite réactive). Et la médecine en général s'oriente vers des étiquettes plus descriptives. D'ailleurs, l'American Psychiatric Association a statué que Asperger n'est même pas un descripteur utile.

On devrait arrêter de dire "Asperger". C'est une façon d'honorer les enfants tués en son nom ainsi que ceux qui en portent encore l'étiquette.
Dans un cas qui me semble assez proche, les Américains avaient également joué un rôle important dans l'affaire Kurt Waldheim. (chancelier autrichien, secrétaire général de l'ONU, qui avait accessoirement caché pendant des années son implication dans les unités de lutte anti-partisans dans les balkans.)


Modération (Tugdual) : Ajout de la traduction (DeepL, pour test).
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#49 Message par misty » vendredi 20 avril 2018 à 11:57

Meddio a écrit :A ce titre, l'exemple de Richard Strauss est pertinent : malgré la position qu'il a occupé pendant le Reich, pouvons-nous dire que son œuvre musicale est d'une piètre qualité (ce qui fait écho au cas Céline cité plus haut) ?
Beaucoup de gens, y compris en Allemagne à ce que je sais, considèrent l'oeuvre de Wagner comme étant à l'origine de l'idéologie nazie et de l'adhésion de la population de l'époque à ces théories. Ses opéras et autres travaux continuent à être joués partout (sauf en Israel, bien que certains musiciens israéliens souhaitent les jouer) et à influencer plein de compositeurs et artistes.
Je crois que c'est une question vraiment multiple et compliquée, d'autant plus que comme souvent il y a de nombreux biais et l'objectivité me paraît assez inaccessible.

Pour le reste, j'avoue qu'ils peuvent bien faire ce qu'ils veulent, appeler ce qu'ils veulent comme ils veulent, ce que je voudrais ce sont des solutions. Se pencher sur le nom du problème fait rarement avancer la problématique réelle. Depuis que j'ai lu le livre de Silberman, je l'ai senti venir, je savais que des sources dissonantes seraient trouvées. Que les américains s'interrogent à ce sujet, je comprends bien, maintenant il me semble qu'en France on a mieux à faire et de bien plus urgent (d'autant plus que beaucoup de français me semblent assez mal placés pour "jeter la pierre" au sujet de choix divers et variés faits dans les années 40... :? )

L'entretien est effectivement très intéressant, et je suis d'accord avec la distance entre la vision US du SA et la nôtre. Perso, je déteste le terme Aspie, ne me suis jamais sentie appartenir à aucune communauté réelle ou supposée, et mes résultats me positionneraient plutôt dans le AHN à ce que j'ai compris. Le terme "Asperger" m'avait été conseillé en contexte social et professionnel au prétexte qu'il était moins "connoté autisme". S'il devient "connoté nazi", on me conseillera peut-être autre chose :mrgreen: mais quoiqu'il en soit, pour les raisons que j'ai données cette histoire m'en touche un peu une sans faire bouger l'autre, comme on dit un peu vulgairement.
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#50 Message par Benoit » vendredi 20 avril 2018 à 12:06

Extrait de l'article parce que déjà les rézosocios jouent dans la polémique :
Regarding Asperger’s contributions to autism research, there is no evidence to consider them tainted by his problematic role during National Socialism.They are, nevertheless, inseparable from the historical context in which they were first formulated, and which I hope to have shed some new light on. The fate of “Asperger’s syndrome” will probably be determined by considerations other than the problematic historical circumstances of its first description—these should not, in any case, lead to its purge from the medical lexicon. Rather, it should be seen as an opportunity to foster awareness of the concept’s troubled origins.
Spoiler : Traduction : 
En ce qui concerne les contributions d'Asperger à la recherche sur l'autisme, il n'y a aucune preuve qu'elles soient entachées par son rôle problématique pendant le national-socialisme, mais elles sont néanmoins inséparables du contexte historique dans lequel elles ont été formulées pour la première fois et sur lequel j'espère avoir jeté un nouvel éclairage. Le sort du "syndrome d'Asperger" sera probablement déterminé par des considérations autres que les circonstances historiques problématiques de sa première description - celles-ci ne devraient en aucun cas conduire à sa purge du lexique médical. Elle devrait plutôt être perçue comme une occasion de faire prendre conscience des origines troublées du concept.
J'interprète ça comme une façon de se désolidariser sans aucune ambigüité de toutes les manoeuvres visant à renommer le S.A. dans le but d'exclure toutes ces personnes "qui n'ont besoin de rien" du spectre de l'autisme. A commencer par E. Scheffer.

Ca me semble important que tout le monde soit au courant de ce qui se joue derrière ces presssions de renommage.


Modération (Tugdual) : Ajout de la traduction (DeepL, pour test).
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Re: Hans Asperger et le nazisme

#51 Message par olivierfh » vendredi 20 avril 2018 à 13:05

dcaius a écrit :Steve Silberman a co-écrit un article avec une personne autiste pour réagir sur ça, sous forme de dialogue, c'est super intéressant.
Intéressant en effet et tout ne va pas dans le même sens:
At one point, Feldner warned Asperger that some of his public statements were “a bit too Nazi for your reputation”—which suggests Asperger was playing a complicated game of making concessions to his bosses while seeming to oppose the Nazis’ most egregious excesses to his friends.
Busztin’s memoir describes “a group of opponents to National Socialism on the Heilpadagogik ward.” So even during the war, there was resistance within the clinic. That’s important. Czech speculates that Asperger eventually left to serve on the front lines in Croatia so he wouldn’t be implicated in the hiding of the boy. But as Sheffer puts it, “Even the extent to which one could, or should, make moral judgments is an open question. Asperger was a minor figure in the child euthanasia program, nowhere near as active as some of his associates… he was not personally involved in killing… Asperger’s actions were perhaps less straightforward than any of these labels suggest.”
Spoiler : Traduction : 
À un moment donné, Feldner a averti Asperger que certaines de ses déclarations publiques étaient "un peu trop nazi pour votre réputation" - ce qui suggère qu'Asperger jouait un jeu compliqué consistant à faire des concessions à ses patrons tout en semblant s'opposer aux excès les plus flagrants des nazis à ses amis.
Le mémoire de Busztin décrit "un groupe d'opposants au national-socialisme dans le quartier Heilpadagogik". Ainsi, même pendant la guerre, il y avait de la résistance au sein de la clinique. C'est important. Czech spécule que Asperger a fini par quitter pour servir sur les lignes de front en Croatie afin de ne pas être impliqué dans la dissimulation du garçon. Mais comme le dit Sheffer, " même la mesure dans laquelle on peut, ou devrait, porter des jugements moraux est une question ouverte. Asperger était un personnage mineur dans le programme d'euthanasie des enfants, loin d'être aussi actif que certains de ses associés... il n'était pas personnellement impliqué dans le meurtre... Les actions d'Asperger étaient peut-être moins directes que ne le suggèrent ces étiquettes..."
Modération (Tugdual) : Ajout de la traduction (DeepL, pour test).
TSA de type syndrome d'Asperger (03/2017) + HQI (11/2016).
4 enfants adultes avec quelques traits me ressemblant, dont 1 avec diagnostic TSA et 1 au début du parcours de diagnostic.

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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#52 Message par dcaius » vendredi 20 avril 2018 à 13:17

Voici ma traduction de la réponse d'Ari Ne'eman (que vous pouvez lire en anglais ici si vous le souhaitez):

Quelques réflexions sur l’étude publiée aujourd’hui dans @MolecularAutism au sujet de la collaboration d’Asperger aux crimes nazis contre les personnes en situation de handicap. (fil)
L’étude argumente de façon convaincante que Hans Asperger a collaboré aux projets nazis d’eugénisme, utilisant une richesse de preuves documentaires dont la compilation par l’auteur doit être saluée. (1)
L’étude a ses défauts – par exemple, elle critique NeuroTribes de @stevesilberman pour l’omission de ces informations sur Asperger, alors que l’auteur de l’étude sait très bien que la raison pour cela est qu’il a décliné de mettre ses recherches à disposition de Silberman. Mais dans l’ensemble, c’est une étude solide. (2)
Certain-e-s seront alarmés par la nouvelle qu’Asperger – dont une partie considérable du spectre autistique a porté le nom pendant presque deux décennies – était nazi. Certain-e-s penseront peut-être que cela fait du tort au mouvement pour la neurodiversité. Je ne suis pas du tout d’accord avec cela. (3)
Tout d’abord, cela fait des années que le gros de la communauté autiste ne s’identifie plus par les diagnostics du syndrome d’Asperger ou “Aspie”. De nos jours, l’identité autiste est plus fréquemment associée au seul terme “autisme”. (4)
Les termes de « syndrome d’Asperger » étaient utiles pendant un temps, pour remédier aux effets noctifs de la définition étroite et restrictive de l’autisme qu’avait conçue Leo Kanner ; cela a servi son but. L’autisme aujourd’hui est compris autrement que par la définition de Kanner. (5)
Si cette révélation avait émergé dix ans plus tôt, quand l’identité liée au syndrome d’Asperger était encore très prisée, était un outil pour élargir les conceptions de l’autisme auprès du grand public, cela aurait été bien plus difficile. (6)
Mais aujourd’hui, nous avons dépassé cela – et notre communauté devrait être suffisamment mature pour cesser d’idôlatrer des cliniciens et trouver nos héro-ïne-s parmi les rangs des personnes #ActuallyAutistic (7)
Secondement, le DSM-5 a regroupé le syndrome d’Asperger dans un diagnostic plus large d’autisme en partie parce que le diagnostic avait dépassé sa date limite en terme d’utilité clinique et que la séparation était devenue activement nocive. (8)
J’étais consultant pour le groupe de travail de neurodéveloppement pour le DSM-5 qui a pris cette décision et a encouragé un diagnostic unifié d’autisme. Il y avait plusieurs bonnes raisons à cela. (9)
Mon collaborateur autiste dans ce travail au sein d’ASAN, Steven Kapp, et moi, soutenions les recherches qui montraient que le syndrome d’Asperger, TED-NOS et TSA étaient utilisés de manière irrégulière, sans lignes directrices claires et cohérentes. (10)
Le diagnostic que l’on obtenait avait davantage à voir avec le docteur que l’on consultait et à quel stage de notre vie l’on était ou les traits que l’on présentait. Certaines personnes ont eu les trois diagnostics différents suivant le moment. (11)
De plus, la séparation était instrumentalisée de manière politique pour attaquer les personnes autistes qui avaient des opinions. Quiconque n’était pas d’accord avec un autism parent (« parent d’autiste », ndlt) célèbre était accusé-e de « n’avoir que le syndrome d’Asperger », même si ce n’était pas leur diagnostic. (12)
Cela était (est toujours) particulièrement ironique, puisque les mêmes groupes de autism parents n’hésitaient pas à utiliser des statistiques de prévalence qui incluaient le syndrome d’Asperger et les TED-NOS pour affirmer qu’il y avait une « épidémie d’autisme », mais discréditaient les personnes autistes qui n’étaient pas d’accord avec elleux en instrumentalisant le diagnostic. (13)
Sans doute plus important encore, le syndrome d’Asperger et les TED-NOS étaient souvent utilisés pour nier l’accès aux services à des enfants et adultes autistes, parce qu’iels n’avaient pas « le bon diagnostic ». Nous avons écrit un communiqué qui soulignait cela pour le changement dans le DSM-5 : http://autisticadvocacy.org/policy/briefs/dsm-5/ … (14)
Avec ce contexte, il est important de ne pas surestimer l’impact de cette révélation sur notre compréhension moderne de l’autisme. Le travail effectué ces trente dernières années ne dépend pas de la vertu d’un médecin autrichien mort depuis longtemps. (15)
Selon la même logique, la manière dont le diagnostic de syndrome d’Asperger a pu être utile et amener un progrès pendant ses années d’usage ne devrait pas nous aveugler quant à la duplicité d’Asperger. (16)
Certain-e-s diront peut-être qu’Asperger était sous pression – ce qui est vrai, sans aucun doute – ou que la collaboration n’était pas optionnelle sous le régime nazi des années 40. Cela fait du tort à toutes les personnes courageuses qui ont agi en risquant leurs propres vies pour sauver les personnes juives, les personnes en situation de handicap et les autres personnes ciblées. (17)
Ces personnes courageuses était l’exception plutôt que la norme, pas seulement du fait de leur courage mais du fait de l’antisémitisme systémique et du mépris pour les vies handies qui étaient pervasifs en Allemagne, en Autriche et dans la culture européenne de l’époque. (18)
L’étude de Czech, malgré ses failles, documente le fait qu’Asperger faisait partie de cette culture et a tenté d’édulcorer sa réputation après les faits, avec grand succès. (19)
Au final, il y a certaines décisions dont les conséquences morales nous définissent, bien après que nous soyons parti-e-s, et à l’exclusion de toute autre chose. La décision de collaborer avec la machine de mise à mort nazie est une de ces décisions. (20)
Comme tous les êtres humains, celleux qui ont pris cette décision étaient des personnes complexes, nuancées qui avaient leurs propres raisons pour leurs actions – mais leur faille morale dans un moment critiques les définit avant tout comme des collaborateurs du régime le plus malveillant, abject que le monde ait jamais connu. (21)
En somme, nous ne devrions pas honorer Asperger davantage, tout comme nous ne devrions pas laisser cette compréhension de l’histoire (qui aurait dû arriver depuis longtemps) amener une régression pour les personnes autistes – les victimes des nazis – dans leur lutte qui a progressé ces dernières décennies. (22)
---------------------------------------
Benoit a écrit : 1. Je ne crois pas que les gens s'identifient au SA en France. Il fait partie de nous mais il n'y a pas d'effet 'communautaire' ni du coup de risque pour les gens qui se seraient identifies de façon exclusive au SA.
2. Les anglo saxons ont ceci de particulier qu'ils n'ont jamais ete occupes dans la derniere guerre. Ca leur donne une vision probablement differentes de ce que pouvait etre la vie sous un regime nazi. (enfin, en esperant que leur connaissance historique ne sorte pas de chez Marvel, parce que j'ai des doutes quand je lis SuperVillain...)
Pour le 1., je sais pas trop. C'est difficile de jauger ça, on a pas de stats sous le coude. En revanche ce qui peut être dit c'est que le diag de S.A. est toujours utilisé en France, et que pas mal de personnes se revendiquent donc "autiste Asperger", "Aspie". Quand je parle du fait que je suis autiste avec des gens, c'est une des premières remarques/questions qui vient : "Ah, autiste Asperger c'est ça ?" "Pourquoi on parle d'autistes et d'autistes Asperger, c'est quoi la différence ?" etc. Par ailleurs au niveau associatif, contrairement aux USA ou au Royaume-Uni, en France il n'y a pas (à ma connaissance) de structure associative de self-advocacy du genre d'ASAN qui ne fasse pas de hiérarchie entre les diagnostics. Il y a quelques assos pour les personnes S.A., quelques assos qui parlent d'autisme, j'ai l'impression que c'est quasi exclusivement des structures dirigées par des parents allistes de personnes autistes. La situation me paraît donc quand même en décalage avec l'activisme autiste anglo-saxon. Il n'y a pas une communauté "Aspie" extrêmement active comme il y a pu en avoir à l'étranger, certes. Mais pour autant, la hiérarchie entre les diags (ou du moins la séparation conceptuelle) règne en France, non ?

Pour ce qui est du point 2., Herwig Czech est un historien autrichien dont le grand-père était nazi, c'est pas un américain qui se fait des idées farfelues sur l'Europe durant la Seconde Guerre Mondiale et qui sous-estime la pression sociale à l’œuvre à cette époque. D'ailleurs ça fait des années que Czech étudie les crimes médicaux durant le IIIè Reich. (source)
Benoit a écrit :J'interprète ça comme une façon de se désolidariser sans aucune ambigüité de toutes les manoeuvres visant à renommer le S.A. dans le but d'exclure toutes ces personnes "qui n'ont besoin de rien" du spectre de l'autisme. A commencer par E. Scheffer.
Tu peux développer ? Je suis pas sûr-e de bien saisir ce que tu veux dire par là.
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#53 Message par Benoit » vendredi 20 avril 2018 à 13:42

dcaius a écrit :Pour ce qui est du point 2., Herwig Czech est un historien autrichien dont le grand-père était nazi, c'est pas un américain qui se fait des idées farfelues sur l'Europe durant la Seconde Guerre Mondiale et qui sous-estime la pression sociale à l’œuvre à cette époque. D'ailleurs ça fait des années que Czech étudie les crimes médicaux durant le IIIè Reich. (source)
Je fais référence aux réactions des communautés aspies (principalement nord américaines), pas au travail (inattaquable) de l'historien tchèque, qui par ailleurs conclus en donnant son point de vue de l'exploitation de ses travaux dans un autre contexte.
C'est sa collègue que je vise.
dcaius a écrit :Tu peux développer ? Je suis pas sûr-e de bien saisir ce que tu veux dire par là.
Lis les deux dernières interventions de l'interview, tout est là.

Eta: citation précise :
Sheffer’s article and book made it clear that she is battling Asperger’s name because she is battling the notion of a full Autistic spectrum. She wouldn’t be the first to try to kick those of us who speak and live independently out of our diagnoses. With the information coming out about Asperger’s words and actions, she makes a strong case for removing his name from autism. Many people would like to see those of us who have been diagnosed with Dr. Asperger’s name removed from our autism diagnoses as well. They have decided we are “too high functioning” to be Autistic.
Spoiler : Traduction : 
L'article et le livre de Sheffer indiquent clairement qu'elle se bat contre le nom d'Asperger parce qu'elle se bat contre la notion d'un spectre Autistique complet. Elle ne serait pas la première à essayer de donner un coup de pied à ceux d'entre nous qui parlent et vivent indépendamment de nos diagnostics. Avec l'information sur les paroles et les actions d'Asperger, elle présente de solides arguments en faveur du retrait de son nom de l'autisme. Beaucoup de gens aimeraient que ceux d'entre nous qui ont été diagnostiqués avec le nom du Dr Asperger soient également retirés de nos diagnostics d'autisme. Ils ont décidé que nous sommes " trop performants " pour être autistes.
La meilleure nouvelle de la journée c'est que Czech exprime exactement le contraire dans un papier, donc une source un poil plus fiable qu'un livre. (et pourtant, bien plus de gens acheteront et liront le bouquin que n'iront lire la publi gratuite).


Modération (Tugdual) : Ajout de la traduction (DeepL, pour test).
Modifié en dernier par Benoit le vendredi 20 avril 2018 à 14:08, modifié 2 fois.
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#54 Message par dcaius » vendredi 20 avril 2018 à 14:02

Ah ok, merci de la clarification, mes excuses pour le malentendu !
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#55 Message par Meddio » samedi 21 avril 2018 à 2:55

misty a écrit : Beaucoup de gens, y compris en Allemagne à ce que je sais, considèrent l'oeuvre de Wagner comme étant à l'origine de l'idéologie nazie et de l'adhésion de la population de l'époque à ces théories. Ses opéras et autres travaux continuent à être joués partout (sauf en Israel, bien que certains musiciens israéliens souhaitent les jouer) et à influencer plein de compositeurs et artistes.
Je crois que c'est une question vraiment multiple et compliquée, d'autant plus que comme souvent il y a de nombreux biais et l'objectivité me paraît assez inaccessible.
Wagner est mort en 83 et Hitler né en 89, et s'il a influencé le nazisme, c'est au même titre que tout le romantisme allemand qui cherchait à construire à un pays émergeant (ou sur le point d'émerger) une identité forte. De plus, il était question de trouver un sens commun, global, au-delà d'un Dieu, un homme qui serait capable d'être affranchi des liens créées par le religieux et de prendre lui-même en main son destin (c'est tout le problème de ce que cherche Wotan dans le Ring et qui prendra vie sous la forme de Siegfried, c'est aussi au coeur de Parsifal qui est affranchi de tout préjugé religieux pour perpétuer l'ordre des choses). Après il était antisémite (cf. Le Judaïsme dans la musique), mais il était très courant de l'être à l'époque (même si Nietzsche ne l'était pas et que c'était en partie la cause de leur brouille) - pensons que plus tôt, même des grands auteurs reconnus comme Voltaire associé à tout le côté positif des Lumières l'étaient (mort 105 ans plus tôt). Dire que le nazisme est une suite logique du romantisme, d'accord mais accuser Wagner d'être aux prémices du parti nazi me semble lui faire porter une responsabilité trop grande.


misty a écrit :Pour le reste, j'avoue qu'ils peuvent bien faire ce qu'ils veulent, appeler ce qu'ils veulent comme ils veulent, ce que je voudrais ce sont des solutions. Se pencher sur le nom du problème fait rarement avancer la problématique réelle. Depuis que j'ai lu le livre de Silberman, je l'ai senti venir, je savais que des sources dissonantes seraient trouvées. Que les américains s'interrogent à ce sujet, je comprends bien, maintenant il me semble qu'en France on a mieux à faire et de bien plus urgent (d'autant plus que beaucoup de français me semblent assez mal placés pour "jeter la pierre" au sujet de choix divers et variés faits dans les années 40... :? )
Entièrement d'accord !
Benoit a écrit :J'interprète ça comme une façon de se désolidariser sans aucune ambigüité de toutes les manoeuvres visant à renommer le S.A. dans le but d'exclure toutes ces personnes "qui n'ont besoin de rien" du spectre de l'autisme. A commencer par E. Scheffer.
Cela voudrait dire que si cette "polémique" est mise en avant, c'est pour redéfinir le SA et écarter toutes les personnes qui prennent sur eux à un très haut point - quitte à s'épuiser, quitte à ronger leur capital santé, - et n'essayent vraiment de demander de l'aide qu'en tout dernier recours ? C'est horrible et ça me donne envie de stopper tout effort net !

Un unijambiste essaye de marcher avec des béquilles aussi vite que ceux qui ont deux jambes et ne demander d'aide que quand vraiment il n'en pourra plus, et on voudrait le considérer comme quelqu'un ayant deux jambes ? (c'est caricatural mais pour mieux imager l'idée).

dcaius a écrit :Certain-e-s diront peut-être qu’Asperger était sous pression – ce qui est vrai, sans aucun doute – ou que la collaboration n’était pas optionnelle sous le régime nazi des années 40. Cela fait du tort à toutes les personnes courageuses qui ont agi en risquant leurs propres vies pour sauver les personnes juives, les personnes en situation de handicap et les autres personnes ciblées. (17)
Ces personnes courageuses était l’exception plutôt que la norme, pas seulement du fait de leur courage mais du fait de l’antisémitisme systémique et du mépris pour les vies handies qui étaient pervasifs en Allemagne, en Autriche et dans la culture européenne de l’époque. (18)
Ce n'est bien sûr pas le but. Dire que l'un est normal ne veut pas dire que l'autre n'est pas glorieux ! La norme n'est pas (forcément) positive (surtout quand elle conduit à des aberrations) mais il s'agissait de dire qu'Asperger n'aurait rien fait de plus choquant que la majorité des gens de l'époque - ce qui, en mon sens, valorise d'autant plus ceux qui sont allé "à contre courant" et ont résisté à la tendance et au nazisme.

Benoit a écrit :
She wouldn’t be the first to try to kick those of us who speak and live independently out of our diagnoses [...] Many people would like to see those of us who have been diagnosed with Dr. Asperger’s name removed from our autism diagnoses as well. They have decided we are “too high functioning” to be Autistic.
Ok, j'ai ma réponse, donc c'est à un degré encore supérieur à ce que j'imaginais plus haut. Du coup [semi HS] est-ce qu'un unijambiste qui revendiquerait n'avoir besoin de rien parce qu'il fait deux fois plus d'efforts avec des béquilles ne risquerait pas de provoquer des réactions du type : "bon bah c'est bon, on ne lui donne rien, regardez, il dit lui-même qu'il n'a besoin de rien" ?

Benoit a écrit :La meilleure nouvelle de la journée c'est que Czech exprime exactement le contraire dans un papier, donc une source un poil plus fiable qu'un livre. (et pourtant, bien plus de gens acheteront et liront le bouquin que n'iront lire la publi gratuite).
Le livre me semble souvent vu comme une "consécration" (qui a fait l'épreuve des maisons d'édition) qui aurait donc plus de valeur qu'un autre biais de publication. Toutefois, je ne sais pas si cette vision fétichiste du livre peut s'appliquer à tout type de publication.
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misty
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#56 Message par misty » dimanche 22 avril 2018 à 14:21

Meddio a écrit :Dire que le nazisme est une suite logique du romantisme, d'accord mais accuser Wagner d'être aux prémices du parti nazi me semble lui faire porter une responsabilité trop grande.
A moi aussi, et puis si tu pars comme ça les australopithèques deviennent vite à l'origine du trou dans la couche d'ozone :mrgreen:
L'art ce sont des gens qui s'inspirent d'autres gens, c'est comme ça depuis les animaux sur les parois des grottes (même probablement bien avant). Certifier ce qui appartient à qui est aussi stérile à mes yeux que d'extrapoler sur ce que des personnes voulaient dire ou pas il y a un siècle, dans un contexte totalement différent du notre.
Benoit a écrit :J'interprète ça comme une façon de se désolidariser sans aucune ambigüité de toutes les manoeuvres visant à renommer le S.A. dans le but d'exclure toutes ces personnes "qui n'ont besoin de rien" du spectre de l'autisme.
Dans ce cas on s'éloigne des théories nazies et on se rapproche de celle où il y a 2 catégories d'autistes: d'un côté ceux qui pourraient mais ne veulent pas (les "pas vraiment déficitaires") et de l'autre ceux qui ont beau essayer mais qui n'arriveront jamais à rien (les "malades"). Le comble étant que tu peux changer de catégorie juste en changeant d'interlocuteur. :|

Pour moi la question du SA est avant tout celle de la déficience intellectuelle, je situe le nerf de la guerre là même si c'est peut-être à tort. Tant que les experts ne disposeront pas de tests adaptés aux profils autistiques je trouverais déraisonnable de parler de déficience intellectuelle dans le cadre de troubles autistiques. Je vois ça comme la célèbre citation sur le poisson qui est évalué à sa capacité à monter à l'arbre.
Je pense que l'autisme SDI ne repose sur rien de concret étant donné le souci de méthodologie à la base, du coup je ne suis pas vraiment surprise que ce soit la porte ouverte à déclarer tout et n'importe quoi à ce sujet. Même combat à mes yeux concernant le non-verbal vs verbal.
Meddio a écrit :Cela voudrait dire que si cette "polémique" est mise en avant, c'est pour redéfinir le SA et écarter toutes les personnes qui prennent sur eux à un très au point - quitte à s'épuiser, quitte à ronger leur capital santé, - et n'essayent vraiment de demander de l'aide qu'en tout dernier recours ?
Il y a déjà des manoeuvres très visibles qui vont dans ce sens. Si les personnes impliquées dans la prise en charge des troubles dont on parle pouvaient prendre conscience que le fait de compenser peut créer une problématique au moins aussi importante (même si différente) que de ne pas compenser du tout parce qu'on est suffisamment "atteint" pour ne pas comprendre ce qu'il y aurait à compenser ni pourquoi on le ferait, je pense qu'un grand pas serait fait.
*Diag TSA*

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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#57 Message par Meddio » dimanche 22 avril 2018 à 14:46

Oulà
Meddio a écrit :à un très au point
... Je tombe de au (comme le veut l'expression) !

Il faut que j'arrête d'envoyer des messages à 2h55 du matin !

@ Misty C'est sûr : j'ai lu un fil dont le sujet était l'espérance de vie des aspergers et j'ai immédiatement pensé à la compensation comme dommage collatéral : le fait de faire plus d'efforts (que ce qu'on devrait), d'être en hypervigilance, de ne pas dormir la nuit pour repasser en boucle des conversations, en préparer d'autres du lendemain, de lutter en permanence contre soi-même, d'avoir de mauvaises habitudes par rapport à ce qui serait bon pour nous et, dans une certaine mesure, de s'imposer beaucoup de stress supplémentaire (peur de faire un faux pas par exemple) en sont de exemples.

Après, il me semble que l'argumentaire selon lequel :

Nazis = méchants
Asperger = nazi
Donc syndrome d'asperger remis en cause

me semble être léger et ne reposer que sur la forme. C'est de l'acabit d'un discrédit de peu de valeur type rumeurs de cour de récréation.
Cela ne me semble pas assez sérieux pour de telles fins.
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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#58 Message par Bloat » lundi 23 avril 2018 à 14:28

Benoit a écrit :2. Les anglo saxons ont ceci de particulier qu'ils n'ont jamais ete occupes dans la derniere guerre. Ca leur donne une vision probablement differentes de ce que pouvait etre la vie sous un regime nazi.
Comme rappelé :
dcaius a écrit :Herwig Czech est un historien autrichien dont le grand-père était nazi, c'est pas un américain qui se fait des idées farfelues sur l'Europe durant la Seconde Guerre Mondiale et qui sous-estime la pression sociale à l’œuvre à cette époque.
Et sinon à l'inverse des Etats-Unis, en France on minimise la collaboration au nom, après-guerre de la réconciliation nationale et de la nécessaire reconstruction, aujourd'hui du mieux-à-faire ou de c'est-du-vieux :
misty a écrit :Que les américains s'interrogent à ce sujet, je comprends bien, maintenant il me semble qu'en France on a mieux à faire et de bien plus urgent (d'autant plus que beaucoup de Français me semblent assez mal placés pour "jeter la pierre" au sujet de choix divers et variés faits dans les années 40... :? ).
misty a écrit :Pour le reste, j'avoue qu'ils peuvent bien faire ce qu'ils veulent, appeler ce qu'ils veulent comme ils veulent, ce que je voudrais ce sont des solutions. Se pencher sur le nom du problème fait rarement avancer la problématique réelle.
Sur le papier, non, le nom ne change rien ; dans la pratique c'est plus compliqué :
  • nommer un diagnostic d'après quelqu'un est un hommage et une reconnaissance de l'apport de cette personne à la médecine, il est donc problématique d'utiliser le nom d'un médecin qui a bafoué l'éthique médicale et a piétiné le serment d'Hyppocrate ;
  • je pense que beaucoup de personnes seraient gênées d'être diagnostiquées du nom d'un Nazi ; dur de porter un (imaginaire) « syndrome de Mengele », non ? Pour les patients, quelles conséquences sur l'estime de soi ou à l'école, dans la vie de tous les jours ? Et pour la science, cela détournera les chercheurs et les donateurs...
Modifié en dernier par Bloat le lundi 23 avril 2018 à 14:41, modifié 2 fois.
diagnostiqué « trouble du spectre de l'autisme sans déficit intellectuel [...] associé à un profil cognitif haut potentiel »

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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#59 Message par Benoit » lundi 23 avril 2018 à 14:39

Bloat a écrit :Comme rappelé :
Ca fait deux fois qu'on me rappele un truc que je n'ai pas écrit.

Mon propos c'est la façon dont la communauté Aspie, majoritairement anglo-saxonne jusqu'à preuve du contraire, va réagir à l'article, pas critiquer l'article.
Bloat a écrit :Et sinon à l'inverse des Etats-Unis, en France on minimise la collaboration au nom, après-guerre de la réconciliation nationale et de la nécessaire reconstruction, aujourd'hui du mieux-à-faire ou de c'est-du-vieux :
Ouais, les Etats-Unis ont une attitude totalement objective sur leurs camps de re-concentration dans leur pourtant courte histoire coloniale (Philippines) ou leur façon de traiter les "ennemis japonais" sur leur sol pendant la guerre.

Il faut remarquer que l'Autriche (dont il est question) ne s'est posé la question de la "collaboration" que récemment (suite à l'affaire Waldheim, avant leur "roman national" faisait d'eux des victimes à partir de l'Anschluss), ce qui explique à mon avis pourquoi ces études sortent encore maintenant.

On pourrait penser que le temps passé aide à raisonner la tête froide sur le sujet mais manifestement pas.
je pense que beaucoup de personnes seraient gênées d'être diagnostiquées du nom d'un Nazi ; dur de porter un (imaginaire) « syndrome de Mengele », non ? Pour les patients, quelles conséquences sur l'estime de soi ou à l'école, dans la vie de tous les jours ? Et pour la science, cela détournera les chercheurs et les donateurs...
Du coup ça tombe plutôt bien que l'article exclu totalement que H. Asperger ait été un nazi ou qu'il ait quoique ce soit de similaire entre lui et Mengele. (lequel a perduré dans ses convictions pendant toute sa vie).
Identifié Aspie (広島, 08/10/31) Diagnostiqué (CRA MP 2009/12/18)

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Être Aspie, c'est soit une mauvaise herbe à éradiquer, soit une plante médicinale à qui il faut permettre de fleurir et essaimer.

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Re: Hans Asperger : Le Docteur et les Nazis

#60 Message par Flower » lundi 23 avril 2018 à 15:10

Je suis plutôt d'accord avec Benoît, quand je lis l'étude, le mot le plus souvent mentionné me semble être "ambivalent". Un nazi convaincu, c'est autre chose... Là il semblerait plutôt qu'il s'agit de quelqu'un qui a souhaité faire carrière et a saisi les opportunités. Le seul truc vraiment problématique qui ressort de l'étude, c'est qu'il a envoyé deux enfants pour euthanasie, parce qu'il est quand même improbable qu'il ne savait pas ce qui se passait. C'est assez horrible en effet, mais on ne parle pas de dizaines ou de centaines d'enfants non plus.

Ce que fait surtout cette étude, c'est déconstruire l'image du médecin bienveillant et qui essayait de protéger ses patients. Clairement il n'était ni un Saint ni un semi-opposant au nazisme.
Spoiler :  : 
Dans le contexte de l'époque, on peut partir du principe que parmi ceux qui travaillaient dans le secteur public (hôpitaux compris), personne n'était à 100% "propre". Et ceux qui voulaient ou faisaient carrière encore moins. En Allemagne on a commencé par "purger" après la guerre mais on s'est arrêté très vite car difficile de distinguer ce qui relève de l'adaptation de façade des opinions profondes, et on pouvait difficilement virer tout le monde. J'imagine qu'en Autriche c'était pareil, beaucoup d'adaptation de façade et d'opportunisme. Combien de gens aujourd'hui se révolteraient s'ils peuvent faire carrière parce que certains collègues sont renvoyés?


La problématique du nom devrait disparaître d'elle-même vu qu'on a déjà décidé de fusionner les différentes formes d'autisme sous l'appellation "troubles du spectre de l'autisme".
Détectée HQI dans l'enfance, diagnostiquée TSA de type syndrome d'Asperger en juillet 2015.

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