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Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : lundi 8 avril 2013 à 22:38
par koala
Je viens de finir le livre d'Hugo Horiot et je ne peux m'empêcher de le trouver très...bizarre...

Tuer Julien pour qu'Hugo vive? Ce n'est pas un cas de dédoublement de la personnalité? Aussi, les médias parlent du passage "d'autiste sévère non verbal jusqu'à l'âge de 6 ans" à autiste aux symptômes "insoupçonnables", et là je trouve que cela n'est pas honnête. Hugo n'a jamais était autiste "sévère" dans le sens ou l'on entendrait couramment. Il refusait de parler: il était atteint de mutisme, mais comprenait absolument tout, même à 3 ans (si l'on en croit son récit). C'est bien différent.

En tout cas, je dois dire que j'ai eu du mal à adhérer. Mais c'est peut être dû à la violence: ses fantasmes de meurtres en tout genre m'ont vraiment mis mal à l'aise. Mais je pense que ce récit est trop étrange pour ne pas être sincère en tous les cas.

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : lundi 8 avril 2013 à 22:51
par Jean
De ce que j'ai compris, il s'agissait bien d'un autisme sévère (pas de paroles) : compte tenu de ce qui a suivi, il n'y avait pas de déficience intellectuelle.

Tant qu'un autiste ne s'exprime pas, on ne peut comprendre ce qu'il peut ressentir.

Je ne crois pas qu'un autiste ait des symptômes "insoupçonnables". Dans ses interviews, Hugo Horiot a des facilités d'expression verbale, mais la violence de ses réactions, de son argumentation me semble "typique".

J'ai entendu Lila raconter des choses semblables : l'envie de pousser ses persécuteurs dans l'escalier pour les tuer. Et aucune tentative manifeste pour le faire. Hugo ne baisse pas les yeux ...

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mardi 9 avril 2013 à 10:14
par Jacline
koala a écrit : Tuer Julien pour qu'Hugo vive? Ce n'est pas un cas de dédoublement de la personnalité? Aussi, les médias parlent du passage "d'autiste sévère non verbal jusqu'à l'âge de 6 ans" à autiste aux symptômes "insoupçonnables", et là je trouve que cela n'est pas honnête. Hugo n'a jamais été autiste "sévère" dans le sens ou l'on entendrait couramment. Il refusait de parler: il était atteint de mutisme, mais comprenait absolument tout, même à 3 ans (si l'on en croit son récit). C'est bien différent.
Je trouve que votre réaction ressemble fort à celle du psychanalyste Denys Ribas dont j'ai parlé plus haut.

Et puis vous allez me faire réagir à quelque chose qui commence à sérieusement m'agacer : les petites cases où on met les autistes. Il a, j'ai, le même autisme enfant et adulte même si adulte, l'autisme est apparemment "insoupçonnable". Pour moi, il n'y a pas de différence entre Kanner et Asperger, seulement une différence dans leur approche et dans l'âge des enfants qu'ils ont observés. Par ailleurs, le témoignage de Birger Sellin nous prouve que même les autistes profonds comprennent. Bien plus qu'on ne peut soupçonner.
Il y a une interview où le bégaiement d'Hugo affleure quand même sans doute parce que l'émotion de colère est là.
C'est peut-être, sans doute, un symptôme aussi cette apparente égalité d'humeur.

Hugo, ne comprenait pas tout, il ne comprenait pas avant un moment précis que sa mère se battait pour lui. Et là il pouvait "renaître". Naître suppose un baptême à un prénom.
Jacline

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mardi 9 avril 2013 à 12:31
par Jacline
Mars a écrit :il ne parlait pas aux personnes qu'il n'aimait pas. Est-ce que cette stratégie est partagée par d'autres aspies ?
J'y reviens encore Mars avec le petit Dibs et le Dr Axline
Alors que des jeunes filles passent dans la rue et le saluent et que l'intérêt de Dibs était plutôt pour un camion.

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- J'veux pas dire bonjour ! J'veux pas leur parler ! cria-t-il. J'veux pas dire un mot !
- Tu les regardes, tu les entends te parler, mais elles t'ennuient, alors tu ne veux pas leur parler, dis-je.
- C'est ça dit-il. Les gens sont si méchants que je ne leur parle pas. Mais je parle au camion. Je dis au revoir au camion.
- Un camion ne peut rien dire qui t'ennuie, n'est-ce pas ? Lui dis-je.
- Le camion est gentil.
Je ne sais pas si « ennui » est la bonne traduction du texte original. Je crois que je dirais plutôt « dérangement ».
Jacline

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mardi 9 avril 2013 à 12:38
par koala
Je suis désolée que mon opinion vous agace. Je suis consciente qu’étant NT, ma vision de l’autisme est ce qu’elle est, et que je ne comprends pas tout. Ma réaction n’est pas celle d’un psychanalyste (de grâce…), mais celle d’un parent qui ne peut s’empêcher d’être interpellée par la couverture médiatique de ce livre ; les journalistes évoquent le passage d’un état « d’autiste sévère », à autiste aux symptômes « insoupçonnables ». Et là, franchement, c’est limite…

Comprenez-moi : je suis extrêmement méfiante par les déclarations de personnes qui prétendre pouvoir « guérir » ou « sortir de l’autisme » les enfants dits « autistes sévères ». Cela crée des faux espoirs pour les parents, et même du désespoir tout court quand les progrès de leurs enfants ne sont pas à la mesure de leur attente. Hugo était mutique : il refusait de parler, ce qui est différent de ne pas pouvoir parler. Le mutisme (sélectif ou total) est d’ailleurs un symptôme assez courant du SA.

Je ne cherche pas à mettre les autistes dans des « cases ». Mais ce sont les cases employées par les journalistes qui ont couvert le livre, et les psychiatres, et ces mots ont tout de même une certaine signification. Pour moi, « autiste sévère » veux dire autiste non verbal, qui n’a pas accès à la compréhension du langage, à la pensée abstraite, avec un retard mental associé. Asperger veux dire symptômes autistiques sans retard de langage, et sans retard mental. Vous avez raison de dire que ces deux « cases " (comme tous les diagnostics et toutes les catégories d’ailleurs) sont imparfaites. Et il est également vrai que les retards mentaux sont sans doute beaucoup moins fréquents qu’ils n’y paraissent, et sans doute que les tests de QI ne sont pas des outils adaptés pour mesurer l’intelligence des autistes non verbaux. J’entends tout cela très bien. Mais il n’empêche que je pense qu’il y a tout de même différents types d’autisme, qui correspondent sans doute à des milliers de types de causes, encore pour la plupart inconnues. Et je ne pense pas que l’on passe pas d’ « autiste sévère » à Hugo Horiot tel qu’il est passé à la radio. Et je pense que cette caractérisation par les médias n’est pas saine.

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mardi 9 avril 2013 à 12:59
par Jacline
Koala,
Ce n'est pas votre opinion qui m'agace. Ce sont les cases. Toujours les cases. La pensée par case.
J'ai été une enfant pour qui il a été dit "autisme très profond" à une période où on ne connaissait pas l’appellation "sévère" ni même le travail d'Asperger. J'ai cru moi-même en être sortie et j'ai voulu donner cet espoir là ! Naïvement !
Koala a écrit :autiste non verbal, qui n’a pas accès à la compréhension du langage, à la pensée abstraite, avec un retard mental associé
On a pu croire (j'ai pu croire) que j'étais de ceux-là...
Jacline

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mardi 9 avril 2013 à 13:07
par koala
Je comprends Jacline votre énervement avec les cases. Et peut être suis je un peu trop pessimiste et négative..

Mais on m'a vendu tellement de "vent" pour mon fils...du coup je ne sais plus trop..

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mardi 9 avril 2013 à 13:28
par Benoit
koala a écrit :Et je ne pense pas que l’on passe pas d’ « autiste sévère » à Hugo Horiot tel qu’il est passé à la radio. Et je pense que cette caractérisation par les médias n’est pas saine.
Il me semble que Josef Schovanec a un parcours du même genre.

Les média font des raccourcis approximatifs dans tous les domaines, mais je pense que les gens sont à même de comprendre de quoi il s'agit : d'individus qu'on a faussement considérés comme des déficients intellectuels et "éduqués" (ou plutôt pas) comme tels, et qui se sont sortis de cette machine à broyer à un moment donné.

D'une certaine façon, ils prouvent par l'exemple que les "recommendations" définissant un âge pour le diagnostic, un type de prise en charge à chaque âge, etc... (type HAS) ne sont au final pas des passages obligés, que même les personnes ayant été prises en charge bien plus tard mais de façon individualisée sont tout à fait capable d'atteindre le niveau "normal" d'autisme sans déficience.

Je suis persuadé qu'il est dans l'état actuel des connaissances scientifiques extrèmement difficile (voire impossible) de déterminer à un jeune âge quelles sont les déficiences d'un jeune autiste (intellectuelles, sensorielles) et à quel niveau il pourrait "prétendre" atteindre à l'âge adulte. Il faudrait tout simplement faire le maximum pour chacun, et ne surtout pas orienter tel ou telle à cause d'une idiotie comme le résultat d'un test de Q.I. sur un enfant.
Josef répête assez souvent que lui même n'a jamais pu satisfaire aux critères d'entrée au CP (toujours pas aujourd'hui).

TLDR: les gens ça ne peut pas rentrer dans des cases.

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mardi 9 avril 2013 à 14:03
par Nath62
Je suis aussi sortie du livre d'Horiot un peu déboussolée (on me l'a offert). Je l'ai lu sans me renseigner sur ce qu'il est devenu, pour justement essayer de ne voir que mon opinion du témoignage, pas son battage médiatique, pas ce qui en a été dit.

La raison de son mutisme, sa compréhension très particulière du monde, pour un si petit bout (et aucune raison de penser qu'il n'en a pas le souvenir véritable, mon fils se souvient de choses qu'il l'ont marqué en cours de classe de ses 2 ans (dont je n'ai pas eu connaissance). Ce sens de la justice et de l'injustice, tout ça m'a touchée, sa manière de se protéger du monde au lycée, c'est comme ça que j'ai fait (mais poussé un peu plus, j'ai aussi eu des très bonnes notes, pour qu'on arrête de me demander des choses pas dans mes cordes à la maison, si j'avais des bonnes notes, on me laissait tranquille).

Mais c'est effectivement un témoignage perturbant, peut être un peu trop revendicateur et qui interpelle, cette volonté de dire au monde "j'ai vaincu" alors qu'il a "juste" eu la chance de trouver des moyens de vivre avec l'autisme sans que cet autisme l'empêche de vivre, avec l'appui d'une mère qui n'a jamais laissé tomber. (phrase boiteuse mais qui me parait plus compréhensible qui si je la tournais mieux). C'est évidemment ce qu'on espère à tout enfant atteint d'un handicap ou d'une maladie, d'arriver à mener sa vie à bien envers et contre tout, parfois contre soi même aussi.

Je vais le prêter et sans doute le relire après qu'on me l'aura rendu. Je reste sur ma faim (et oui, moi aussi, toutes ces images de violence m'ont perturbée mais ma fille me dit en ce moment qu'elle ne veut plus retourner à l'école car elle ne veut plus voir les têtes des vilains de sa classe, alors, je me dis qu'elle doit aussi en avoir, des violences, en ce moment, en tête...., cette lecture est sur ce point, bien tombée ici)

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mardi 9 avril 2013 à 19:06
par Jean
La violence des propos d'Hugo est finalement compréhensible. Elle est sans nuances : quoi d'étonnant ?

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mercredi 10 avril 2013 à 9:24
par Nath62
En ce qui me concerne, elle est perturbante car "entendue" via les mots dans la tête d'un enfant.

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mercredi 10 avril 2013 à 12:18
par Madu
J'ai eu l'occasion d'entendre Françoise Lefèvre et Hugo Horiot.
(sur un DVD d'AEVE si je me souviens correctement - ce qui n'est pas toujours le cas )
Françoise Lefèvre a un style qui doit faire les délices des psychanalystes
mais c'est trop pour moi le "discours-fleuve-pseudo-poétique-super-verbeux".

L'histoire m'intéressait beaucoups pourtant.
Si on fils a le même style littéraire je ne vais pas pouvoir lire son livre. C'est bète.
En interview, il "passe bien" comme on dit, pas prétentieux et même très sympathique.

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mercredi 10 avril 2013 à 12:43
par koala
Le style n'est pas vraiment "verbeux": il est même plutôt très concis, voire "brutal". Les phrases sont courtes, le sens très clair..Ce n'est pas un ouvrage sur l'autisme. C'est un récit sur ce qu'il a vécu, pensé, senti pendant son enfance. Ce n'est pas du tout intellectualisé. Mais c'est vrai qu'il y a aussi beaucoup d'images, de métaphores etc. Je ne connais pas le style littéraire de sa maman, mais j'ai trouvé cela assez facile d’accès.

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mercredi 10 avril 2013 à 12:45
par Madu
Bien recu, merci Koala :)

Re: "L'empereur, c'est moi" - Hugo Horiot

Posté : mercredi 10 avril 2013 à 22:50
par Nath62
Ah oui, ça se lit hyper bien, le style est très très agréable. Moins de deux heures de lecture ici :)