Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

Je suis autiste ou Asperger, j'aimerais partager mon expérience. Je ne suis ni autiste ni Asperger, mais j'aimerais comprendre comment ils fonctionnent en le leur demandant.
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PaterFamilias
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#16 Message par PaterFamilias » mercredi 12 juin 2019 à 12:03

Hello,

De mon côté (je rappelle que je ne suis pas diagnostiqué), je n'ai pas de problème par rapport au changement, et je n'ai pas de routine (sauf pour des raisons d'organisation) ; j'ai un sens de l'humour développé, porté sur l'humour noir.
C'est plutôt du côté de mes interactions sociales que mon côté potentiellement Asperger peut se retrouver.
Geogaddi a écrit : lundi 10 juin 2019 à 22:28 ...
-Je lis souvent que les autistes ont besoin d'une vie routinière, craignent le changement. Ce n'est pas du tout mon cas.
...
-Je lis aussi souvent que les autistes ne comprennent pas l'humour réciproque ou le sarcasme. J'ai toujours compris l'humour réciproque, ri aux mêmes blagues que les non-autistes. Le seul soucis a été le sarcasme, que j'ai appris mécaniquement, ce n'était pas inné, mais à présent je le comprends et l'applique sans problème quelle que soit la situation...
Y a-t-il des gens dans mon cas?
HPI d'après ma psy, père d'un THPI (diagnostiqué) et d'un HPI (pas encore diagnostiqué)

Space
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#17 Message par Space » mercredi 12 juin 2019 à 12:25

Es-tu perméable à tous types de changements Géogaddi ? Mon côté HQI veut que je ne supporte pas la routine dans mon travail (gestes répétitifs, journées toutes tracées... sauf si cela touche un centre d'intérêt) mais paradoxalement j'ai une aversion pour les changements sociaux (nouveau collègue, nouvelle fille dans l'équipe de foot...), d'ordre organisationnel (modification d'une méthodologie...) et de dernière minute (réunion annulée/décalée...).

Quant au sarcasme, personnellement je ne le comprends pas dans le sens où je ne le partage pas (je distingue "comprendre = décoder" et "comprendre = partager/être d'accord"). Je suis incapable d'en être l'auteure et je reste fermée lorsque j'en suis témoin. Le respect est une valeur fondamentale à mes yeux.
Femme HQI-TSA

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misty
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#18 Message par misty » jeudi 13 juin 2019 à 13:32

Geogaddi a écrit :Je comprendrai que tu n'aies pas envie de développer, mais j'avoue ne pas avoir vraiment compris ce qui était choquant.
J'ai personnellement de gros soucis avec le changement (même microscopique), mes routines m'empoisonnent la vie et j'aimerais bien arriver à apprendre à détecter qu'on se moque de moi avant mes 80 ans.
Quand j'ai vu le titre du topic, j'ai directement pensé que j'y lirais des solutions, des pistes, ou des liens vers des analyses pertinentes à ce sujet. Donc j'ouvre, et je commence à lire.

Et en réalité, je vois (résumé un peu grossier): "bon, alors moi en fait, ces difficultés là, je ne les ai pas, celles là non plus, celles là non plus, celles là non plus, non plus, non plus... Ca je gère hyper bien, ça aussi, ça aussi, ça aussi... Tel truc ne me pose aucun souci non plus, tel autre est ok, tel autre aussi... ...Mais je suis fatiguée (ah ben merde alors! :innocent: )"
=>"Mais comment ça se fait que j'ai reçu un diagnostic d'autisme, du coup?" (au hasard: parce que tu es allée le chercher activement et que tu t'es entêtée après un 1er avis négatif argumenté?)

Et le pompon:
mais j'ai du mal à m'y retrouver du point de vue identitaire.
Le fameux "point de vue identitaire". Celui qui me passe à 40 km au dessus de la tête, que je n'arrive pas malgré mes efforts à voir autrement que comme une sorte de "souffrance de l'automoi-sclérosé", et qui cause tant de dégâts dans la perception de l'autisme.
Celui qui fait qu'encore de nos jours des parents s'entendent dire qu'ils "font des histoires/se montent la tête/raisonnent trop en termes de cases-étiquettes" alors qu'ils s'épuisent juste à tenter de faire comprendre les difficultés réelles et majeures de leurs enfants.
Celui qui renvoie les autistes adultes demandant la prise en compte de leurs particularités en contexte pro direct dans leurs buts au motif que "oh hein ça va tout le monde a mal au ventre vous êtes pas le centre du monde/yen a marre de vos jérémiades et revendications d'enfants gâtés/tout ça pour se mettre en avant et faire son intéressant franchement c'est lamentable/etc...etc...etc..."

Imagine toi quelqu'un qui a juste un peu de mal à marcher, à qui on livre (à sa demande) un fauteuil roulant, et qui vient dire "ah quand même ce fauteuil roulant j'ai du mal à m'y identifier d'un point de vue identitaire". C'est pas un peu indécent?

Le malentendu majeur, c'est que le diagnostic autisme c'est une métaphore du fauteuil roulant. Le diagnostic permet d'identifier des choses in-améliorables sans prise de conscience/psychoéducation en amont (ex: quand j'ai découvert la notion de mentalisation via U.Frith et que d'un coup la lumière s'est allumée), c'est sa raison d'être. Et tout ce qu'on met en place par la suite seul ou accompagné représente une sorte de "fauteuil roulant invisible" qui va nous permettre d'évoluer un minimum dans le monde au lieu de se contenter d'y survivre (ou de s'en exclure totalement et volontairement pour les lassés de la "mission survie" permanente).

Les non-autistes projettent tout un tas de choses absurdes sur les autistes, une des pires me semble être ce fameux "point de vue identitaire". A la fois c'est un peu risible, parce que maintenant que les connaissances ont évolué, des aidants/pros se retrouvent à devoir essayer de convaincre des autistes "flagrants" mais qui traînent des diags lourds/hyperstigmatisants mais boiteux genre "schizophrénie atypique/asymptomatique" d'aller chercher un vrai diag (peu y vont parce qu'en fait ils s'en tapent copieusement, des diagnostics et des considérations identitaires); et à la fois les conséquences ne sont pas du tout risibles parce que c'est l'argument majeur quand on veut décrédibiliser un autiste. Autiste qui le plus souvent s'en tape aussi, du diagnostic et de la "composante-automoi", mais qui a besoin d'aide adaptée.

Ce qui me choque c'est ça, et le fait que plus ça va plus je considère que ces questions identitaires ne sont rien d'autre que des projections de non-autistes (hors codes sociaux/normatifs la notion d'identité n'a pas vraiment de sens en soi).
Que quelqu'un vienne ici vampiriser le temps et l'énergie de parents et d'autistes adultes qui galèrent déjà à mort avec de telles considérations superficielles et contextuellement absurdes me dérange. Que ce soit fait de manière aussi décomplexée, sur un topic qui annonce totalement autre chose (littéralement, en tout cas), me choque carrément.
Voilà, désolée. :innocent:
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#19 Message par EnHans » jeudi 13 juin 2019 à 15:08

Je comprends tout à fait Misty. J'espère que l'auteur du topic aura le recul nécessaire. C'est délicat de donner le fond de sa pensée... sans blesser autrui. C'est difficile pour tout le monde, autiste ou nt. Je maintiens mon impression que Geoggadi peut avoir une mauvaise perception : parfois on peut croire réussir un entretien d'embauche alors que non... on peut croire avoir des amis alors qu'ils te trahissent sans scrupules aucun... Par contre pour le fait de garder un travail, en effet, c'est factuel. Ou alors je me trompe complètement sur le sa, c'est possible aussi.
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#20 Message par hazufel » jeudi 13 juin 2019 à 15:56

Quand ton entretien d'embauche débouche sur un poste, c'est que tu as réussi. Si tu n'as pas le poste, tu ne dis pas que tu as réussi l'entretien d'embauche :innocent:
Pour les amis, l'évocation du sujet par Peter Vermeulen est intéressante, car il cite des autistes qui viennent à ses ateliers et qui disent avoir des amis. Ensuite quand il leur demande, combien de fois avez-vous été invité à un anniversaire / repas chez eux cette année ? Ou sinon depuis quand l'avez-vous été ? Ben, là d'un coup, tu te rends compte si tu as des amis dans ta tête ou en vrai... Parce que les réponses sont en général, très loin de la réalité de ce qu'on imagine être de l'amitié. Parce qu'il n'y a aucune invitation dans l'année, voire dans les cinq précédentes...
Là, la réalité tu l'as en direct.
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#21 Message par EnHans » jeudi 13 juin 2019 à 16:59

Bonjour Hazufel, pour moi, c'est possible de réussir un entretien d'embauche et de ne pas avoir le poste... pour x raisons : un meilleur candidat (ce qui ne signifie pas nécessairement que tu as échoué, il y a juste quelqu'un d'un peu meilleur), le choix peut se porter, en partie, sur autre chose que l'entretien en lui même... Puis ça reste un choix humain : Loin de moi l'envie de remettre en cause la qualité des tous les drh/recruteurs ou autres mais parfois j'ai constaté des choix dénués de bon sens. J'ai discuté quelque fois avec des gens qui faisaient passer des entretiens d'embauche, j'en ai déduit que c'était aléatoire parfois.
Parce qu'il n'y a aucune invitation dans l'année, voire dans les cinq précédentes...
Là, la réalité tu l'as en direct.
En effet
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hazufel
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#22 Message par hazufel » jeudi 13 juin 2019 à 18:32

Mikkel, si tu n’as pas le poste tu ne peux pas savoir si tu as réussi l’entretien. Si tu dis l’avoir réussi c’est que tu as eu le poste. :innocent:
Le recruteur te donnera jamais la vraie raison de toute façon...
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#23 Message par Zebra3 » dimanche 16 juin 2019 à 0:35

Il parle du ressenti perso, pas de s'i la le poste ou non. Parfois on sent si on n'a pas été bon (dire une connerie, aligner des blancs à répétitions, transpirer, etc) ou au contraire si on a été à l'aise (connaissance du poste, aisance sans se laisser aller, etc), ce qui ne signifie pas pour autant qu'on aura le poste.

Vous n'avez pas la même approche du mot "réussir" dans le cas présent :wink: .
Un peu comme gagner la course ou, sans forcément gagner la course, battre son propre record.
Statut : Proche d'éventuel(s) aspie(s) et/ou TDA/H. Personnellement, probable tendance TDA, doué, zébré :mryellow: éventuellement tendance aspie. Je vais peut-être faire un bilan neuropsy...

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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#24 Message par EnHans » dimanche 16 juin 2019 à 7:44

J'aime beaucoup ta référence au sport :D
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Gianna
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#25 Message par Gianna » dimanche 16 juin 2019 à 18:09

Geogaddi a écrit : lundi 10 juin 2019 à 22:28 J'ai été diagnostiquée autiste récemment, et je suis encore dans cette phase où je lis des témoignages pour essayer de me retrouver et m'approprier ce nouveau diagnostic.
Je me reconnais sur cet aspect là de ton témoignage car moi aussi mon diagnostique est récent.

Après la stupeur et le choc de la restitution, et pour moi ça a été très violent, il y a le temps de l'assimilation et ce n'est pas si facile que ça. Il m'arrive souvent de me réveiller le matin et d'avoir l'impression que ce n'a été qu'un mauvais rêve, qu'en fin de compte je me trouve assez normale et que même sur tel ou tel point je ne m'en sort pas si mal que ça. Ceci dit la journée commence et dans le déroulé du quotidien, chaque jour, je pourrais même dire chaque heure, mes difficultés me sautent à la figure et me ramènent au réel et je ne peux plus nier ce qui par les faits redevient évident.

Et pourtant le lendemain matin à nouveau le tout peut recommencer à me sembler comme irréel. Je me dis que je ne perçois mes difficultés qu'une par une, lorsqu'elles surviennent, alors je n'arrive pas encore bien à en avoir une vue d'ensemble et à les rattacher au TSA comme tel. Mais le bilan diagnostique sert à ça, à lister toutes les difficultés rencontrées, à objectiver le tout et à en donner un compte rendu global. Il faut y revenir, le relire même si ça fait mal et l'intégrer petit à petit.

Là ça n'engage que moi et je ne sais pas si tu es concernée, mais je pense aussi que la tentation du déni n'est jamais loin, surtout quand on a grandi dans un milieu plus ou moins élitiste, où la réussite sociale est (sur)valorisée. Au delà de la négation pure et simple du diagnostique, le déni peut prendre des formes plus subtiles, du genre : "Ok je suis autiste mais je peux tout faire comme les autres (ou presque)" ; ou bien "L'autisme c'est quelque chose de glamour" ; ou encore : "L'autisme ce n'est pas vraiment un handicap mais ce n'est qu'une différence comme tant d'autres etc. blablabla".

En tout cas comme d'autres l'ont déjà dit, le voyage ne semble pas en totale contradiction avec le TSA (cf. Josef Schovanec et ses récits de personnes autistes en voyage). Pour la petite histoire lorsque j'avais la vingtaine j'ai voyagé seule au Proche Orient, et ensuite j'ai toujours beaucoup voyagé. Par contre j'ai vécu mon dernier déménagement comme un véritable cataclysme et 5 mois plus tard je ne m'en suis pas encore remise.
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#26 Message par Clovis » dimanche 16 juin 2019 à 18:53

Ton message me touche beaucoup Gianna.

Ces difficultés qu'on voudrait nier après avoir travaillé si dur à les résoudre et à les cacher mais qui malgré tout vous reviennent sans cesse en pleine figure... C'est à désespérer. Je crois pourtant avoir fait beaucoup pour y croire, ne pas sombrer dans l'aigreur, la misanthropie ou la haine de moi...

Je crains parfois d'en devenir vraiment fou, de ne plus arriver à tenir le masque, de sombrer pour de bon. C'est ce qui ma fait franchir le pas de la démarche diagnostic.
Diagnostiqué TSA.

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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#27 Message par Gianna » lundi 17 juin 2019 à 0:06

Courage Clovis, tiens bon, de ces luttes intérieures je trouve qu'on apprend aussi beaucoup, même si parfois en apparence on ne faisait que tourner en rond. C'est pas la peine de culpabiliser en plus de ça :kiss:
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#28 Message par lulamae » lundi 17 juin 2019 à 0:28

Clovis a écrit : Je crains parfois d'en devenir vraiment fou, de ne plus arriver à tenir le masque, de sombrer pour de bon. C'est ce qui ma fait franchir le pas de la démarche diagnostic.
Même combat… Mais c'est pire depuis que j'ai eu les bilans neuro-psychologiques. Avant je n'avais pas du tout conscience de me perdre, porter un masque, etc... J'ai vécu dans une totale cécité mentale sur mon fonctionnement, à peine si je me sentais "habiter" en moi, je guettais tout à l'extérieur pour essayer de savoir "ce" (ou "qui") j'étais. Et évidemment je me laissais raconter n'importe quoi sur moi.
Cela alternait toutefois avec des moments de lucidité aiguë, mais toujours un peu à côté de la plaque. Franchement, j'ai l'impression de démarrer ma vie, d'avoir encore deux ans d'âge mental. :innocent:
Et ça crée un grand décalage avec mon âge réel, ça aussi, j'ai du mal à le vivre, je me sens ridicule.
Diagnostic d'autisme juillet 2019.

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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#29 Message par Geogaddi » vendredi 5 juin 2020 à 1:42

Bonsoir,

Je reviens ici car il s’est passé pas mal de choses, et je pense que cela pourrait parler aux personnes récemment diag. Pour être honnête j’ai quitté le forum après cette discussion, j’étais trop mal d’avoir blessé des gens. Le post de misty m’a fait un électrochoc (nécessaire). Je suis encore désolée, mille fois. Un an plus tard, j’aurais eu exactement la même réaction que toi, je comprends enfin ce que tu as voulu dire.

Je suis absolument dépitée de pas avoir pu voir à quel point j’ai pu me mettre des œillères sur mes propres difficultés. Comme certains avaient déjà pu le deviner, je serais apparemment (toujours un peu) en déni du diag.
J’avais posté, de manière vraiment très idiote, suite à un entretien d’embauche que j’avais « réussi » (les guillemets sont importants). J’en avais conclu que je devais finalement pas être si autiste, et j’avais fini par faire la liste de toutes les choses qui me faisaient penser que ce n’était pas le cas.

J’ai effectivement eu le job en question, et ça a été une année horrible, je suis arrêtée. Le fameux entretien d’embauche réussi ? Ma supérieure m’a dit qu’ils m’avaient trouvée très bizarre, que personne ne voulait me prendre, mais qu’elle s’était battue parce que j’étais la plus « compétente ».

Je n’ai jamais réussi à m’intégrer. On dit que je n’ai aucun savoir-être. Mon bilan n’est pas bon, ils ne vont pas me reprendre, j’ai apparemment pas « conscience qu’il y a des gens autour de [moi] » (spoiler : si, mais je sais pas ce que je suis censée faire). J’ai aussi de gros pb dysexécutifs. Je ne parlerais pas des deux heures à pleurer en rentrant tous les soirs, sans savoir pourquoi (arrêté net les jours de repos ou dès le début de l’arrêt, comme par hasard). J’ai dû bosser en équipe, un fiasco à chaque fois, je prenais la parole quand je ne devais pas la prendre, pas assez « diplomate », je comprenais pas les consignes et les règles « évidentes », « provoquait » le boss (comprendre : ne pas saisir ses critiques sous entendues et donc ne rien changer).

J’ai répondu à plusieurs offres d’emplois pour bosser dans des institutions du fait de mes qualifications, recalée à toutes à cause du « langage non verbal » et mon « manque d’empathie ».

J’ai fait une formation à distance cette semaine pour essayer de trouver un autre boulot pour me mettre à mon compte, un truc pour réussir à apprendre à me « vendre ». J’en pleure depuis des jours, la formatrice a été étonnée que je n’arrive pas à « lire entre les lignes ». Elle nous a appris des techniques pour brosser les gens dans le sens du poil, mener une conversation à son avantage. Je suis tombée des nues. Tout le monde a dit connaître ça depuis l’adolescence, que c’est « comme ça que les relations marchent » (ah bon ?).

Pour les amis… J’en ai 4 (ce qui est surement déjà bien). Deux autistes, deux NT, que je vois rarement. C’est eux (entre autres) qui m’ont poussée, en me disant que j’avais pas du tout conscience de l’image que je renvoyais. Ils m’ont rappelée que le peu de soirées qu’on avait faites ensemble, j’étais restée dans mon coin, avec eux. Que j’étais complètement silencieuse ou « en retard » quand il fallait réagir à qqc. Que j’avais pas eu de relation amoureuse depuis 10 ans, que relationnellement j’avais, par rapport à la moyenne, une vie sociale très très restreinte. Ils ont pas voulu me casser ou quoi, ils ont rebondi quand je leur ai dit que j’avais « hyper progressé », que ok enfant et ado j’avais certaines difficultés sociales mais que maintenant j’étais « comme eux ». Ils m’ont expliqué ça en toute bienveillance, pour m’ouvrir les yeux en qq sorte.

Le coup de grâce (parce que même là évidemment quand ils m’ont dit ça, j’ai répondu que non, qu’ils exagéraient…) c’est quand une personne de ma famille qui bosse en SESSAD avec des TSA et connaît mon diag m’a dit à quel point elle pensait à moi, tout le temps, en les voyant. Elle m’a raconté des anecdotes tout au long de l’année, et m’a demandé récemment pourquoi j’étais autant dans le déni, que c’était de l’autisme et pas autre chose que j’avais, qu’elle comprenait pas pourquoi j’avais été me faire diag pour tout rejeter en bloc ensuite. Je m’en étais même pas rendu compte, elle m’a rappelée qu’à chaque fois qu’elle a voulu parler d’autisme avec moi, j’ai minimisé mes difficultés, exactement comme je l’avais fait dans ce topic. J’ai tenu exactement le même discours. Pour elle même si effectivement j’ai une certaine indépendance (encore que, mes parents doivent gérer tout l’administratif, m’aider pour les courses…) et une bonne compréhension de l’humour… Je me fourvoie totalement sur le reste : je suis toujours LA fille bizarre (elle m’a présentée son conjoint qui lui a demandé ensuite si j’avais tenté de lui faire une blague en étant bizarre, en le mettant mal à l’aise. J’étais dans mon état « normal »), elle n’a vu que peu d’amélioration pro ou autonomie en 10 ans (je réussis les entretiens certes parce qu’en général j’ai des qualifications que les autres candidats n’ont pas… puis elle m’a bien rappelée qu’ensuite, à chaque fois, je tiens pas 3 mois et qu’on me reproche d’être totalement à côté).

Pour cette histoire de délire « identitaire »… Je sais pas ce qui m’est passé par la tête. Je supporte plus les personnes en errance qui pensent ça, aujourd’hui. Pour ma psy ça a été un mécanisme de défense et je me suis un peu racontée des histoires à ce niveau-là pour rendre le diag plus acceptable. Ensuite j’ai accepté un job totalement en contradiction avec mon fonctionnement (bah oui, puisque je suis « pas si autiste ») comme si j’avais essayé de me prouver que je l’étais pas. Puis là dos au mur, je suis bien obligée d’accepter que si. Et encore, j’arrête pas de pleurer depuis plusieurs semaines, il paraît que c’est normal, que je dois apprendre à faire le travail de « digestion » que j’ai pas fait l’an dernier.

Voilà, je voulais surtout m’excuser d’avoir offensé des gens et apporter des précisions, ça peut surement aider d’autres personnes qui se pensent « pas si autistes que ça ». Si vous vous posez ces questions, demandez à votre entourage un avis sincère, et essayez d’analyser factuellement les choses : ai-je vraiment tant d’amis que ça ? suis-je vraiment capable de garder un emploi ? etc.
Femme, 24 ans, IDF. Diagnostiquée autiste en février 2019.

EnHans
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Re: Autisme et crainte du changement, routines et sarcasme

#30 Message par EnHans » vendredi 5 juin 2020 à 7:34

A mon avis, tu n'as pas besoin de t'excuser.
Modifié en dernier par EnHans le vendredi 5 juin 2020 à 11:33, modifié 1 fois.
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