Travailler dans le social en étant Asperger ?

Je suis autiste ou Asperger, j'aimerais partager mon expérience. Je ne suis ni autiste ni Asperger, mais j'aimerais comprendre comment ils fonctionnent en le leur demandant.
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#16 Message par Loner » mercredi 10 juin 2020 à 0:11

Petit Foxi a écrit : mardi 9 juin 2020 à 18:23 Bonjour Loner,
J'aime beaucoup ta vision des choses ! J'osais pas le dire en réalité, de peur de passer pour une folle, mais c'est vrai, pour moi ça sonnait en réalité comme une évidence d'y travailler, sans réellement savoir pourquoi !

Je dis toujours qu'il n'y a pas de hasard dans la vie, si tu a découvert ton autisme via ton métier, C'est que ça devait se faire comme ça 😉

Merci pour tes réponses !
;)
Après au-delà de l'attirance , tu imagines quoi des métiers du social? Tu as une idée de ce que tu voudrais faire. Car aider les gens c'est flou. Tu connais un peu? Des proches ? Des reportages TV?
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#17 Message par Petit Foxi » mercredi 10 juin 2020 à 8:34

Ce que j'imagine des métiers du social ? En réalité je ne sais pas trop....C'est juste que je suis persuadé que cest ma voie. Après, est ce que je me trompe ou pas ? Je n'en sais rien !
Pour ce qui est du métier en lui même, non je n'ai pas d'idée précise, mais je sais que je voudrais voyager à travers le monde et aider les personnes du monde entier à crée une terre meilleur, et une meilleur humanité avec plus de solidarité. Je me suis dit que le social étais sans doute le meilleur chemin à suivre pour le moment !
Je regarde régulièrement des reportages sur les personnes qui s'occupe des autistes, leur quotidien, leur difficulté etc....pour l'instant je me renseigne surtout sur ses métiers spécifiques à l'autisme car cest ce qui m'attire le plus, mais je laisse le temps me guider vers ce que je voudrais réellement.
De toute façon, pour le moment, je pars une seconde général, mes études dans le social ne commenceront qu'en première (bac techno ST2S). J'ai du coup encore le temps de réfléchir !😊
Je vais passer un test de précocité pendant les vacances de la Toussaint, l'autisme est pour le moment mis de côté par tous le monde.

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#18 Message par Loner » mercredi 10 juin 2020 à 12:42

Petit Foxi a écrit : mercredi 10 juin 2020 à 8:34 Pour ce qui est du métier en lui même, non je n'ai pas d'idée précise, mais je sais que je voudrais voyager à travers le monde et aider les personnes du monde entier à crée une terre meilleur, et une meilleur humanité avec plus de solidarité. Je me suis dit que le social étais sans doute le meilleur chemin à suivre pour le moment !
Ok mais tu peux aussi travailler dans l environnement pour favoriser un monde meilleur. Je crois qu'il y a une représentation du travailleur social qui agit pour le bien. Sauf que dans la réalité, on reste des CRS à visage humain. (Je provoque exprès).
Il y a toujours une idée de ramener les gens le moins loin de la normalité.
Aussi, tu fais du contrôle social.
Un exemple : j au travaillé auprès de toxicomane (je suis diplômé addictologue en parrallele) nottamment dans un programme d echange de seringue.
Alors oui nous bossons la prevention et la réduction des risques. Oui on accompagnait les gens. Mais mine de rien, l outil (lieu d accueil) dont nous disposions était pour la société un moyen de parquer les gens, d d'eviter les actes délinquants et surtout d economiser des frais de soins en cas de contamination par le VHC. Parceque c est moins cher de permettre aux drogués de se shooter propre plutôt que de les soigner pour leur hépatite. La bienveillance individuelle est une réduction des coûts collective.

Ce que je veux dire , c est que derrière ces métiers, il y a une objectif qui dépasse toutes les bonnes intentions des professionnels. Et cette dissonance est à accepter, sans quoi on se retrouve à se battre pour un idéal et y laisser des plumes.
Faut se demander si ,plutôt que de donner des aides alimentaires, il ne faut pas mieux donner aux gens les moyens d'apprendre à cultiver et à cuisiner...

En fait, tu peux conserver le même esprit en faisant un tout autre métier. Des gens qui fabriquent des maisons en bois ou qui s'occupent d animaux, changent le monde à leur façon. Parfois plus que quelqu un dont le métier et d aider les gens.
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#19 Message par Petit Foxi » jeudi 11 juin 2020 à 12:05

Oui forcément, beaucoup de métiers serve à aider la population autour de nous. Mon frère est charpentier est permet à des personnes d'avoir un toit sur leur tête. Ma mère travaille (sans citer l'entreprise ), comme secrétaire et donne les rendez vous au client, ça les rend heureux d'avoir enfin leur rendez vous !
Des CRS à visage humain ? Je ne m'attendais pas vraiment à cette représentation ! Même si nous n'avons souvent pas le droit d'avoir des sentiments à l'égard des patients, on est pas moins a l'écoute pour autant !
Oui forcément, plus on est normal, mieux c'est. Plus on est sage dans le troupeau de moutons, plus les bergers sont sereins.

Ce ne devait pas être simple comme métier, et je comprend ta vision. Moins nous apportons de problèmes, mieux c'est pour l'état malheureusement...
La société dans laquel nous vivons n'est pas la meilleur, loin de là...il y aurait beaucoup de choses à changer pour améliorer tout ça, et pour apporter une meilleur aide. Mais pour le moment, ce que nous pouvons faire cest accompagné au mieux les autres, c'est leur montrer qu'il mérite leur vie, et qu'ils vont devoir se battre plus que les autres pour y arriver. Mais qu'une fois arrivé au sommet, ils en seront d'autant plus fière !

Chaque métier apporté son savoir, ses compétences aux autres. On a besoin de tout le monde pour avancer, et pour changer cette société. Aujourd'hui, je ne sais pas exactement ce que je ferais de mon futur. Le social m'intéresse bien, donc pour l'instant ça sera ça. Je laisserais le destin me guider et me porter la ou je dois aller.

J'espère que je t'aurais bien répondu !😉
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#20 Message par Loner » jeudi 11 juin 2020 à 15:51

Oui j'emploie sciemment le terme CRS à visage humain parcequ'il semble loin de l'image d'Épinal du travailleur social.
Même si dans mon esprit, je n'accompagne pas les gens dans l'idée de se rapprocher de la normalité ou de la rejoindre, c'est pourtant ce que le financeur demande, chiffres à l'appui.

Il s'agit surtout pour moi de permettre à l'autre de faire son expérience avec le moins de souffrance possible.
Lui permettre d'exister, parfois avec moi, parfois en parallèle de moi, parfois contre moi. Tout en restant dans les clous de la commande sociale et de ses injonctions parfois absurdes et contradictoires. Ce qui demande une sacrée gymnastique et moultes adaptations secondaires (Cf Erwing Goffman /Asile)

Mais je sais pertinemment que je fais du "contrôle social" . Et je crois, sans pour autant perdre ses illusions et idéaux , qu'il s'agit d'en être conscient. L'humain n'a pas tant que ça de place dans ce système.

Et quand bien même, tu montes un projet alternatif, distant de la mécanique des institutions et de ses rouages financiers, tu te heurtes rapidement à des murs. Certains ont les épaules pour ca... Pour infos, le concept de Burn Out vient du social ^^

Le travail social, l'accompagnement éducatif d'enfants en IME, d'adultes précaires tient davantage à la dévotion et l'énergie des professionnels que des tutelles qui les financent. Et finalement, parceque le travailleur social n'a ni la culture de la grève ou des combats (il l'a perdu), s'il ne s'use pas , il continue de se mettre à l'ouvrage, en faisant de son mieux.
Car il y a vraiment de belles choses dans ce metier.

Mais si tu veux, je peux parler du cœur du métier ? La relation ^^
Parceque je t'emmène dans des considerations qui ne sont évidemment pas les tiennes, là où tu en es. :)
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#21 Message par Petit Foxi » samedi 13 juin 2020 à 9:51

Oui je comprend ta vision
Tout ce que tu dis me fait beaucoup penser au film "hors norme". Si tu ne l'as pas vu je te le conseille il est magnifique !
Je suis désolée mais je n'ai pas réellement compris ce que tu entend par contrôle sociale ? Peux tu m'expliquer ?
Oh je ne savais pas, merci de me l'avoir dit !

Je suis persuadé que ça reste un beau métier malgré tout ! Certes pas évident mais avec de beau moments malgré tout que personne d'autre ne vivra

Oui je veux bien, ça m'intéresse beaucoup ! Cest vrai que je suis un peu perdu dans tes explications, même si cest très intéressant 😊
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#22 Message par Loner » samedi 13 juin 2020 à 15:10

Si tu veux le contrôle social, c'est le processus de civilisation. Il est essentiel pour ne pas s'entretuer mais pose inévitablement la question de la liberté de l'individu et de sa propre aliénation.

Dans l'idéal , un travailleur social accompagne l'autre vers l'autonomie..Donc la capacité à se fixer ses propres normes, dans le respect des normes sociales.

Sauf que dans les faits, l'action tient moins dans la volonté d'apporter un espace d'épanouissement pour se réaliser lui-même, que dans celle de le modeler complètement pour qu'il ne s'eccarte pas de trop des normes prescrites.

Or , un individu peut très bien se réaliser dans des choix de vie marginaux, hors norme. Mais le professionnel reste conditionné par la commande sociale. L'espace de liberté idéalisée dans le métier est surtout un espace bridé.. délimité et défini.
Je te donne un exemple simple. Quand tu regardes le devenir des personnes handicapées mentaux. En général les établissements de preprofessionalisation ne proposeront que 3 ou 4 secteurs ( jardin, peinture, ménage, bâtiment...)..
On fait croire aux enfants et à leur parents qu'on va accompagner l enfant vers l emergence du choix. Sauf que dans les faits, son choix sera limité par le panel d'option proposé. Un jeune déficient intellectuel qui veut devenir tatoueur, coiffeur ne pourra pas accéder à ces métiers par la voie qui lui est proposé. Pourtant , les professionnels avancent qu'ils accompagnent l'autre dans l'expression de son individualité. C'est biaisé.

Un sdf qui s'accroche pour faire des démarches n'aura vraiment accès aux dispositifs que si il se sépare de son chien...

Ce que je veux dire, c'est que les travailleurs sociaux représentent la société. Et si leur rôle est parfois de réconcilier les bénéficiaires avec celle-ci, il s'agit aussi de faire en sorte qu'ils soient le moins déviants.
Donc je t'aide ok mais tu rentres dans le cadre que je t'impose.

Hors normes est un chouette film, parcequ'il démontre bien les limites du système. A savoir qu'il y a aussi des publics qui ne rentrent pas dans les cases et pour eux, même si ça chatouille l'ARS ou autres tutelles dans leur frustration de ne pouvoir tout contrôler, l'action doit être tout autant hors normes.

Un travailleur social est là pour apporter des réponses, mais il ne doit pas faire l'économie de questionner ce qui sous-tend son action par rapport à la société et à lui-même.
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#23 Message par Petit Foxi » dimanche 14 juin 2020 à 12:34

D'accord je comprends mieux,
Finalement, on a pas beaucoup de libertés, on doit se plier aux règlements et se taire finalement....
Ni les patients d'ailleurs, si je comprend bien, on leur fait croire qu'ils auront une vie de rêve pour finalement leur cacher la vérité et leur donner une vie qu'ils n'ont pas demande....Cest malheureux....

Oui je confirme, il m'as profondément touchés, surtout quand J'ai compris que cetais la pur et dure réalité...
C'est quoi l'ARS ? Désolée je ne m'y connaît pas beaucoup 😅

Mais finalement, pense tu que tes patients sont heureux malgré tout ça ? Qu'ils arrivent à vivre une vie convenable malgré tout ?
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Re: Travailler dans le social en étant Asperger ?

#24 Message par Loner » dimanche 14 juin 2020 à 13:00

L'ARS (agence régionale de santé) , c'est ce qu'on appelait avant le DDASS.(schématiquement)
C'est l'organisme qui financent certains établissement et pose les conditions.

Comme je te disais, on accompagne des gens là où ils en sont dans l'objectif qu'ils puissent être le plus autonomes possible.
Apres ça dépend du champ d'action qui est très vaste (handicap, protection de l'enfance, insertion adulte ...)
Le paramettre temps est essentiel puisque l'accompagnement s'inscrit dans la durée.
C'est pour cela que les métiers du social sont étroitement liés à la notion de projet.
Il est difficile de savoir si les gens sont heureux au final. Ce n'est pas vraiment l'objectif.
En tout cas, si il s'agit de transmettre le "bonheur", ce n'est pas le bon métier ^^

Tres souvent tu verras des travailleurs sociaux se gargariser d'être parvenus à insérer quelqu'un, s'attribuant le mérite...
Comme si lui-même n'avait même plus de libre arbitre et de capacité d'entreprendre pour lui-même. C'est finalement une sacrée condamnation...

On est pourtant juste des passeurs. Rien de plus.. soyons humble et n'attendons rien. C'est ainsi qu'il se passera des choses.
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Re: Travailler dans le social en étant Asperger ?

#25 Message par Petit Foxi » dimanche 14 juin 2020 à 19:04

Merci pour tes réponses.
J'espère que tu ne le prendra pas mal, mais pouvons nous essayer de parler de choses qui serait plus adapté à mes besoins s'il te plait ? Tout ce que tu dis est réellement intéressant mais je t'avoue que je galère un peu à te suivre 😅
Je répond quand même à ce que tu me dis, j'aimerais bien si tu en as envie bien sûr, que tu m'expliques comment tu arrives à gérer la fatigue au métier, les émotions même si apparament d'après ton récit tu arrives à bien les gérer. As tu tout de même des crises d'angoisses ou un trop pleins d'émotions sensorielle ?
As tu des aménagements par rapport à ton autisme pour réussir à gérer tout cela ?

Du coup pour revenir à ton message ;
Ok pour l'ARS, je comprend mieux. Est ce que beaucoup arrive à leur objectif ? Sont ils régulièrement plus autonome ?
Oui je m'en doute bien, d'autres métiers seront plus apte à répondre à ce besoins.
Tu as un regard très sombre de ce domaine j'ai l'impression. J'espère que tu est tout de même heureux dans ce métier et que tu as trouvé ta vocation?!
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Re: Travailler dans le social en étant Asperger ?

#26 Message par Glaciell » dimanche 14 juin 2020 à 22:04

Petit Foxi a écrit : dimanche 14 juin 2020 à 19:04 Merci pour tes réponses.
J'espère que tu ne le prendra pas mal, mais pouvons nous essayer de parler de choses qui serait plus adapté à mes besoins s'il te plait ?
:lol: En même temps c'est toi qui venais de lui poser toutes ces questions hein ! :lol:
Spoiler : 
C'est quoi l'ARS ? Désolée je ne m'y connaît pas beaucoup 😅

Mais finalement, pense tu que tes patients sont heureux malgré tout ça ? Qu'ils arrivent à vivre une vie convenable malgré tout ?
En tout cas merci à vous deux (pour les questions et les réponses) car j'ignorais beaucoup de choses et je trouve votre échange très enrichissant. :bravo: N'hésitez donc pas à continuer (je retourne à la lecture silencieuse ^^).
Diag. à 37 ans "TSA sans DI ni altération du langage", avec HPI (2020)
"Vous vous voyez comme un Asperger et vous pensez comme un Asperger, donc c'est très bien"
Fille 15 ans HPI + TSA, suspicion TDAH, 3 sauts de classe.

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#27 Message par Petit Foxi » lundi 15 juin 2020 à 7:12

Ha ha oui effectivement 😂
Oh tant mieux si ça peut servir à d'autre personnes, je pensais qu'on était seul, au moins je sais maintenant qu'on a des lecteurs😂
Bonne lecture silencieuse 😁
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#28 Message par Loner » lundi 15 juin 2020 à 9:18

Glaciell a écrit : dimanche 14 juin 2020 à 22:04
En tout cas merci à vous deux (pour les questions et les réponses) car j'ignorais beaucoup de choses et je trouve votre échange très enrichissant. :bravo: N'hésitez donc pas à continuer (je retourne à la lecture silencieuse ^^).
Hehe, je suis content de savoir que ça puisse susciter de l'intérêt. :)
Petit Foxi a écrit : dimanche 14 juin 2020 à 19:04 Merci pour tes réponses.
J'espère que tu ne le prendra pas mal, mais pouvons nous essayer de parler de choses qui serait plus adapté à mes besoins s'il te plait ?
Oui bien sûr.
Je me rends compte que je ne me suis peut être pas adapté à toi.. :innocent:

Alors , contrairement à ce que mes mots ont pu laisser transparaître, je n'ai pas de regard sombre sur mon métier. :). Du tout même.

C'est ce que j'essaie justement de transmettre à mes étudiants: se décentrer au maximum et faire le deuil de leur propre toute puissance. Celle qui nous pousse à être animés de plein de bonnes intentions..

Pourquoi ?

Tout simplement parceque dans l'accompagnement de quelqu'un, on peut facilement le prendre en otage de nos propres désirs et projections.

Parfois, l'autre devient prétexte, porte-étendard d'un combat qui ne le concerne pas.
Il importe donc de prendre de la distance face aux situations rencontrées.

Cette juste distance n'implique pas de ne pas avoir d'émotions. Au contraire, il s'agit de les identifier , du moins être pleinement conscient que nous sommes portés par elles et qu'elles conditionnent le travail. Parfois, nous sommes touchés. Il y a un écho..

Pour ma part, sans doute parceque je suis autiste, je n'ai aucun problème vis à vis de ça. Je peux accueillir tout types de situations sans me sentir bousculé. Pour palier à ça ou le faire émerger, il y'a le travail en équipe, essentiel au métier, qui permet de se décentrer. Il y aussi des temps d'analyse de pratique avec un professionnel (psychiatre, psychologue) permettant d'apposer un regard clinique distancier. Tout cela est essentiel parceque dans le feu de l'action, on ne se rend parfois pas compte de ce qu'on met en place. Une relation est engageante, un lien s'expose, l'affectif est une prise de risque qui se borne mais ne s'interdit pas.

Mais je sais pertinemment que parfois je me trompe. Parfois je prends des postures face aux usagers qui pourraient potentiellement violentes. Dire non à un adolescent en crise pour son bien n'implique pas qu'il nous remercie illico. Au contraire. On porte le cadre, le tordons parfois. Et plus que de l'appliquer, il s'agit de donner à l'autre les moyens de le comprendre afin qu'il puisse rebondir face aux aléas de la vie. L'intention est bonne, la manière de la mettre application, pas forcement. C'est pour cela qu'il ne faut pas attendre gratifications ou reconnaissance. Il faut agir au plus juste et assumer d'endosser parfois le rôle du méchant de l'histoire.

Nous sommes tous sujets à ça. Nous pouvons tous être maltraitants. De même que celui qu'on aide, nous aide aussi. C'est du don/contre-don. On apprends en même temps qu'on transmet. C'est un double mouvement transmission/autodidaxie. Et c'est cette capacité à accueillir l'autre dans ce qu'il a de singulier, qui autorise une relation de confiance authentique et l'émergence de la demande et du choix.
Être travailleur social suppose donc être conscient que l'on peut faire des erreurs, il faut en faire et surtout ne pas se persuader qu'on peut répondre à tous types de situations.

Et c'est le postulat à avoir avant même de chercher à aider les autres.
Savoir que nous ne serons jamais parfait est justement ça qui nous rend professionnel. L'important est d'avoir le recul et d'être humble. L'humilité signifiant d'être conscient de nos forces et faiblesses..sans chercher à être ce que nous ne sommes pas.Respecter les limites de l'autre, suppose déjà de se figurer les siennes. L'autre existe parceque je suis distinct de lui.

Je pose souvent la même question à mes étudiants : qu'est qu'un éducateur?
Souvent ils répondent la même chose.
"C'est quelqu'un qui fait ci, qui fait ça."
Alors je repositionne les choses.
"Je ne vous demande pas ce qu'il fait, mais ce qu'il EST. Ce qu'il incarne."

Et là, c'est tout de suite plus compliqué parceque ca nous confronte à ce que nous sommes, au-delà de la fonction.
L'éducateur prend appui sur lui-même, ses cicatrices, sa sensibilité. Il doit être en mesure d'autoriser la création du lien..et c'est possible que si la relation s'inscrit sur un mode horizontal (c'est à dire sans apport aidant/ aidé, sachant-/apprenant , dominant /dominé), sans quoi on positionne l'autre dans une "dette". Or la finalité de mon boulot est la fin de mon boulot. J'accompagne dans l'objectif de ne plus avoir besoin de le faire. Je crée donc une relation de dépendance dans l'objectif que l'autre s'en affranchisse. Sacré paradoxe..
Lors des concours d'entrée en école de travail social, quand je fais jury, je dis souvent que je recrute des étudiants non pas parcequ'ils ont été bons à l'oral mais parceque je sens qu'ils ont la capacité à remettre en question toutes les conneries qu'ils ont pu me raconter durant leur oral...^^

J'aime à penser que nous sommes passeurs de sens .
Le sens direction
Le sens signification
Le sens sensation.

Concernant la fatigue, il m'est parfois difficile de gérer les fluxs de demandes, les sollicitations, les bruits etc...mais je parviens à composer. Je bosse en institution. Il y a des règles, une organisation, un emploi du temps.
Tout cela structure. Me structure.

Par le passé, j'ai beaucoup travaillé dans la rue, les squats et je ne te cache pas que ça me fut douloureux et épuisant et violent. Pour autant, les usagers m'aimaient bien. :)
Je sais pourtant qu'en tant qu'autiste, j'ai besoin de repères clairs.

Mon principal soucis au quotidien, c'est le bruit. (Les enfants font parfois des crises )

Actuellement, lorsque je sens un trop-plein, je parviens à m'isoler et ma collègue direct connait très bien mon fonctionnement.;)
Parfois ce n'est pas évident..

Je n'ai aucun aménagement. Je l'ai fait moi-même ^^ en m'isolant sur les temps de pauses , en bossant dans mon coin plutôt que dans le bureau collectif. J'évite les appels téléphoniques par exemple..

Pour le moment je ne demande pas d'avantage. Mais conscient que le social évolue et que je peux être amené à changer de travail ou subir les conditions d'une évolution moins confortable, j'engage une démarche de reconnaissance handicap..histoire de prévenir.

:)
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Re: Travailler dans le social en étant Asperger ?

#29 Message par Mylie » lundi 15 juin 2020 à 10:50

Lectrice de l'ombre, au rapport !!

Ce topic est hyper intéressant ! Pour ma part, j'ai bossé dans mon précédent service en lien avec des personnes qui déposent des demandes avec leur travailleur social (ou tout seul) pour essayer de se sortir de situations difficiles. Et.. j'ai fini par craquer.
C'était simple, je ne supportais plus les gens. Trop de téléphone, trop de personnes qui venaient au guichet et que je devais recevoir, il me suffisait d'un seul désagréable ou de mauvaise foi pour effacer tout le positif de la journée. Je prenais énormément sur moi pour rester agréable avec mes interlocuteurs, ce qui me prenait beaucoup d'énergie. Au delà de ça, comme partout, nous étions en réduction d'effectifs, donc plus de travail, plus vite, donc plus de sollicitations.. le tout dans un open space partagé avec le hall de l'accueil et donc beaucoup de bruits..
Depuis que j'ai changé de service, ça va beaucoup mieux.

Je me pensais avoir la fibre pour ce genre de travail, ça correspondait à mes aspirations et à ma vision des choses et j'ai assez vite déchanté. Le travail n'était pas du tout aussi "rose" que dans ma vision et le peu de personnes qui agissaient comme si tout leur était dû m'a vraiment dégoûtée du métier. C'était vraiment une minorité, mais à la longue, c'est devenu pesant. Les directives données (pour une gestion "économique" des choses), et les réorganisations RH à mon travail ont fini par achever la perte de sens que je ressentais jusqu'à là.

Dans tous les métiers, on a une certaine vision des choses, et puis à la longue on fini par avoir une vision plus réaliste. Et cette vision, soit elle nous convient et on s'y adapte, soit on est désenchanté. Il y a aussi la valeur que l'on met dans le travail: quelque chose d'hyper important qui doit nous plaire ? Une extension de ses valeurs ? Ou juste un moyen de remplir le frigo et qui donne les moyens d'assouvir ses passions sur son temps libre ?
09/21: diagnostiquée TSA - anciennement Asperger, par le CRA de Nancy
(J'ai une maladie pulmonaire depuis toujours)

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Re: Travailler dans le social en étant Asperger ?

#30 Message par Loner » lundi 15 juin 2020 à 11:20

Mylie a écrit : lundi 15 juin 2020 à 10:50
Je me pensais avoir la fibre pour ce genre de travail, ça correspondait à mes aspirations et à ma vision des choses et j'ai assez vite déchanté. Le travail n'était pas du tout aussi "rose" que dans ma vision et le peu de personnes qui agissaient comme si tout leur était dû m'a vraiment dégoûtée du métier.
Effectivement, même si cela ne nous ait pas dirigé, on peut s'en prendre plein la figure.C'est important de l'avoir en tête.
Le travailleur social représente la société. Il sert parfois d'exutoire, de réceptacle à frustrations. Car il représente le monde qui nuit, le frustrateur. Quand on ne peut se situer en responsabilité vis à vis de ses actes, on cherche un coupable et souvent, on s'en prend à celui qui aide..du moins, celui qui est là, qui écoute.
De même qu'un usager peut vouloir nous emmener sur un terrain personnel. Et c'est de bonne guerre. il fait partie de notre vie professionnelle, nous faisons partis de sa vie privée. Mais sans distanciation, on peut vite se perdre...

Alors, jeune diplômé, j’ai pu être suivi jusque chez moi par un jeune sdf qui pensait que j’étais son copain..J'ai me suis retrouvé face à d'anciens copains de lycée qui étaient accueillis dans le centre pour SDF où je travaillais. J'ai pu me retrouver sequestré par un toxicomane qui voulait que je lui fournisse de la morphine (je travaillais en centre de soin)
j'ai pu également être limite taxé de pédophile par une mère qui ne supportait pas que je prenne position pour la sécurité de son enfant....J'ai pu laisser une famille en demande d'asile dormir dehors avec des enfants...j'ai provoqué des placements d'enfants. Une femme est tombée en amour pour moi..
j'ai du accompagner des jeunes qui avaient été violées...Je me suis fait frapper, griffer, insulter. Je suis allé à des enterrements..j'ai vu des morts, accompagner des assassins.

A côté, J'ai pu parfois voulu déplacer des montages pour des personnes sans forcement comprendre pourquoi. J'ai rencontré des situations d'enfants qui faisaient écho avec mon enfance. Je me suis attaché, j'ai rejeté...j'ai donné de l'humain.

j'ai aussi reçu de superbes lettres d'anciens usagers me remerciant..d'avoir été là. Des cadeaux, des marques de sympathie.
Une fois , une jeune sdf avait fait la manche pour pouvoir m'offrir du lait en poudre pour ma fille lorsqu'elle etait bébé..
On est loin du SDF qui fait la manche pour picoler..
Un groupe de toxicomane m'avait organisé un pot de départ...Bon des madeleines et du jus de pommes mais l'intention était là.^^
Des parents m'offrent des chocolats, reviennent avec leur enfants de 22 ans que j'ai accompagné quand ils en avaient 12.

C'est ma plus belle récompense: recevoir de temps en temps des nouvelles, et de me dire que tout ça n'a pas été vain. Qu'on a ponctué la vie de quelqu'un.
Je sais que pour certains, j'ai été moteur de développement, tuteur de résilience..Mais on ne peut se décréter comme tel. On fournit juste des conditions, un espace où le lien se crée, s'explore, se partage...le reste, on ne le maîtrise pas et il faut faire avec le risque qu'il ne se passe tout simplement RIEN, qu'on ne serve à RIEN. Et parfois on ne fait pas grand-chose et pour autant, on impacte durablement l'autre. En positif ou en négatif.

Je fournis une présence, un temps nécessaire...Le reste , ça se construit dans la relation..

Je suis persuadé que l'autisme est une force pour moi. Parceque ca a été ma principale faille alors que je me bercais d'illusions que je pouvait être un autre.
HQI, Dyspraxique.
Autiste Asperger
Épileptique
Ma chaîne youtube : https://youtube.com/@FaberRice?si=tA6mxSPleT1r9BhF

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